La loi impulserait-elle les démarches qualité dans les organismes de formation ? Si la labellisation des prestataires formation reste peu répandue en France, certains OPCA, comme l'Agefos-PME, commencent à encourager cette démarche pour aider les petits organismes de formation à décrocher la certification de l'ISQ-OPQF. Et ce, au moment où les normes ISO évoluent. Témoin : une nouvelle norme internationale baptisée ISO 29990 a été lancée en octobre 2010. Spécifiquement orientée sur la qualité des prestations délivrées (à l'inverse des autres normes ISO, qui s'intéressent à la conception et au pilotage de l'organisation de la formation, lire l'encadré), elle insiste sur l'analyse des besoins et l'évaluation de la formation.

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Une norme dédiée aux organismes de formation

Fruit de trois ans de travaux initiés par l'Allemagne et coordonnés par l'Afnor et la FFP (Fédération de la formation professionnelle), la norme ISO 29990 vise à certifier "la qualité des services des prestataires de formation" sur le plan international. "Il y avait bien les normes NF pour la formation, mais elles datent d'une vingtaine d'années. La norme ISO 9001, elle, concerne tous les domaines d'activité. L'intérêt de cette nouvelle norme internationale est de s'adresser uniquement aux organismes de formation", estime Marie-Christine Soroko, déléguée générale de la FFP. Adopté par tous les pays européens, mais aussi par les États-Unis et le Japon, ce nouveau label vise à aider les entreprises à sélectionner un prestataire pour des formations non certifiantes, là où le choix est souvent difficile.

Une norme qui diagnostique les besoins

Si cette norme internationale certifie l'ensemble des formations dispensées par un prestataire (et non une action en tant que telle), "elle renforce les exigences du prestataire en amont de la formation avec le diagnostic des besoins, mais aussi en aval avec une évaluation renforcée", résume la représentante de la FFP. Dans ses procédures, le prestataire s'engage ainsi à analyser les besoins de formation des salariés en fonction de leur profil et de leur niveau de qualification avant l'action (dans un document formalisé). Il doit s'assurer que les moyens et les méthodes pédagogiques de la formation (qui peuvent inclure de l'apprentissage autonome) correspondent aux souhaits et aux objectifs attendus par l'entreprise et les salariés. Et peut les adapter si nécessaire.

L'idée est d'empêcher les erreurs d'aiguillage, encore trop fréquentes : "Il s'agit, par exemple, d'éviter qu'un stagiaire se retrouve dans un stage d'informatique qui ne corresponde pas à son niveau de compétences. On voit encore trop de formations où les niveaux entre débutant et perfectionnement sont mélangés", illustre Marie-Christine Soroko. Pour les stages interentreprises, ce diagnostic pourra notamment s'appuyer sur des questionnaires d'évaluation des connaissances.

Une norme qui encadre l'évaluation

Pour être labellisé, l'organisme de formation doit fournir un document précisant le programme du stage et son objectif, mais également les critères et les méthodes d'évaluation choisis. "Ces modalités d'évaluation peuvent être de différente nature, à chaud après la formation ou quelques mois plus tard auprès du manager pour constater les effets sur la pratique du stagiaire", précise Marie-Christine Soroko. Ces procédures comprennent le transfert des acquis de la formation (dans le cas de formations intra-entreprises notamment).

"Le prestataire doit alors déterminer avec l'entreprise la façon dont elle compte transposer les acquis de la formation dans les tâches ou les responsabilités des salariés, ainsi que la définition précise des indicateurs que l'entreprise considérera comme une réussite", indique le texte de l'Afnor. Dans tous les cas, les rapports d'évaluation doivent être "transparents", comportant "les procédures et les grilles utilisées pour interpréter les résultats observés". En outre, le prestataire doit prévoir des dispositifs pour recueillir l'avis des entreprises ou des stagiaires, ainsi qu'une procédure de traitement des demandes et des réclamations.

Une norme qui implique les dirigeants du prestataire

La norme impose également des critères sur la qualité du management (organisation, finances, gestion des risques) du prestataire de formation. La politique de management de la qualité doit notamment impliquer les dirigeants, un membre du comité de direction devant être désigné pour piloter la démarche qualité et assurer le suivi des procédures en interne. D'autres informations sont également requises pour être certifiées : "business plan" déclinant la stratégie et les objectifs de l'organisme, structure de management, processus-clés répondant au diagnostic des besoins et des méthodes d'évaluation...

Une norme qui passe au crible la politique RH de l'organisme

Curieusement, les exigences en matière d'expertise et de compétences des dirigeants et des formateurs sont loin d'être centrales dans cette norme internationale. Difficile de mettre tous les pays d'accord sur ce point, avoue Marie-Christine Soroko. La liste des compétences-clés indispensables aux formateurs a été renvoyée en annexe de la norme, à titre informatif. Toutefois, le texte précise que le prestataire doit faire preuve d'une politique RH incluant des méthodes d'évaluation régulière de ses salariés et intervenants, "afin de s'assurer que son personnel et ses formateurs disposent des compétences requises par leur poste".

La norme insiste sur la notion de développement professionnel continu des équipes, avec évaluation à la clé. Comme toutes les normes ISO, la certification sera attribuée par des opérateurs agréés, après audit, pour une durée de trois ans. L'organisme de formation devra par ailleurs mener des "audits réguliers" internes pour vérifier le respect des procédures. Reste à voir si les prestataires français seront séduits par l'obtention d'un tel label... À la fin de 2010, un seul prestataire de formation, allemand, avait été certifié ISO 29990.

Labellisation : les OPCA dans la course ?

Si peu d'OPCA se positionnent sur l'accompagnement d'une démarche qualité, l'Agefos-PME Île-de-France a pris les devants afin d'encourager les prestataires de formation de moins de 20 salariés à se doter d'une certification ISQ-OPQF ou NF Services. L'OPCA leur propose un module d'accompagnement et de formation de deux jours et demi pour la certification ISQ-OPQF et de vingt-deux jours pour la norme NF Services. À des coûts avantageux (107 ¤ la formation pour la certification ISQ-OPQF, 1.184 ¤ pour NF Services), grâce à un cofinancement du Fonds social européen. Une opération destinée "à répondre aux nouveaux enjeux de la formation professionnelle", selon l'OPCA. Mais qui vise aussi à permettre aux petits organismes de se distinguer dans un environnement très concurrentiel. Selon l'Agefos-PME, une soixantaine d'organismes franciliens seraient ainsi en cours d'une certification ISQ-OPQF.

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