Odile Decq. Architecte, avec un grand «A»

La plus grande architecte française est bretonne. Sous un look gothique, se cache la conceptrice du Frac de Bretagne, qui sera inauguré à Rennes, début juillet. Rencontre avec une femme qui semble avoir le don d'ubiquité et la passion de la curiosité.

(Photo T. D.)
(Photo T. D.)
Quel est le point commun entre des immeubles de logement, la Banque populaire de l'Ouest, le port de Gennevilliers en bord de Seine, un jardin à Chaumont-sur-Loire, un viaduc d'autoroute et un musée à Rome ? Une femme architecte. Autre façon de poser la devinette : mon premier dessine l'intérieur d'un bateau, mon second aménage des bureaux à Dunkerque et Bruxelles, mon troisième enseigne à Grenoble ou à Montréal et mon quatrième conçoit des installations à Venise, voire sur les toits des Champs-Élysées, qui est-ce ?

Une nouvelle icône pour la Bretagne
À chaque fois, la réponse est la même, il s'agit d'Odile Decq. «Bretonne d'abord, française éventuellement, européenne assurément», déclare cette femme architecte, qui vient de terminer le Fonds régional d'art contemporain de Rennes(Frac). Situé entre les vallées de l'Ille et de la Vilaine, en bordure du parc de Beauregard, il se confronte aux stèles de granit d'AurélieNemours, «L'Alignement du XXIe siècle».
On y retrouve le rouge et le noir, presque sa signature, avec une façade en inox anthracite et du carmin en partie basse. Les deux parallélépipèdes sont fendus en deux par une percée verticale, qui fait office de puits de lumière. Conçu pour être admiré de jour comme de nuit, cet écrin de l'art contemporain doit devenir une nouvelle icône pour la Bretagne. Il colle en tout cas parfaitement aux couleurs du Stade rennais !
Odile Decq a, d'ailleurs, débuté à l'École d'architecture de Rennes, avant de fonder l'agence ODBC, avec Benoît Cornette, à Paris. La construction de la Banque Populaire de l'Ouest et d'Armorique à Rennes, livrée en 1990, avec l'Irlandais Peter Rice pour la façade, leur vaut une reconnaissance internationale immédiate, récompensée par une dizaine de prix nationaux et internationaux. En 1996, son agence reçoit le Lion d'or de la Biennale d'architecture de Venise, l'année où elle réalise la scénographie du pavillon français à la Biennale.

Plus Millénium que Mélusine
Deux ans plus tard, Benoît Cornette meurt dans un accident de voiture, dont elle sort grièvement blessée. Mais cette battante aux allures de fée carabosse, plus Millénium que Mélusine, se construit dans l'adversité. «C'est une forte personnalité, qui sait, malgré tout, être chaleureuse quand elle baisse le pont-levis», confie un de ses proches, l'architecte Loïc Corre.
De son père aux racines rennaises, et de sa mère originaire de Ploudalmézeau (29), elle a gardé le goût des grands espaces, en y ajoutant une part d'extrême qui n'appartient qu'à elle. «J'ai un appartement à Saint-Malo, parce que c'est ce qu'il y a de plus rapide en venant de Paris. La mer, la ville, le vent, tout y est puissant», précise-t-elle, sur un coin de table de son agence, installée sous les toits, dans le quartier du Marais.

Un petit monde de machos
Architecte engagée dans l'art et la cité, OdileDecq donne des cours, selon les années, à Londres et à Vienne, à l'Université de Columbia, aux États-Unis, ainsi qu'à la Kunst Akademie de Düsseldorf, en Allemagne. Élue à la direction de l'École spéciale d'architecture de Paris depuis 2007, elle rivalise aussi avec Nasrine Seradji, directrice de l'École nationale supérieure d'architecture, l'autre école d'architectes située aux Beaux-Arts.
Contrairement aux apparences, ce petit monde reste macho. «Odile est une femme courageuse et combattante et il faut l'être dans ce milieu d'hommes», souligne Jean-François Pousse, breton d'adoption et critique d'architecture. La reine du «concept d'hyper-tension» n'est pas assez dans le moule moderniste, le courant de Le Corbusier, pour avoir été jusqu'ici récompensée par l'Équerre d'argent, la Palme d'or de l'architecture, mais elle est, sans aucun doute, l'une des plus grandes architectes françaises.

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