Dix mille pas et plus. Ah, cette sensation délicieuse de bien-être et de détente totale après un jogging matinal, une séance de marche rapide ou de natation. Les bénéfices immédiats sur le cerveau de l’exercice physique, dus à la libération de neurotransmetteurs (endorphines, dopamine…), sont bien connus des pratiquants, même occasionnels. Mais c’est sans doute à long terme que les effets cérébraux du sport se révèlent les plus puissants. Le sujet est devenu un champ de recherche à part entière, et des dizaines d’articles scientifiques sont publiés chaque année.
Grâce à de multiples études menées chez des rongeurs et chez l’homme, il a été démontré que l’exercice physique stimule la mémoire et retarde le déclin cognitif. Bouger régulièrement permet aussi d’augmenter le niveau d’attention et d’autres capacités intellectuelles, comme la planification, le contrôle, voire la créativité. Sans compter l’impact positif sur l’humeur et l’anxiété qui font de la marche, du jogging ou du vélo des outils thérapeutiques à ne pas négliger dans la dépression et dans bien d’autres maladies mentales.
Les premiers indices des effets de l’exercice physique sur les neurones ont émergé dans les années 1960, avec les travaux d’un trio de chercheurs américains. A l’université de Berkeley, en Californie. Marian Diamond, David Krech et Mark Rosenzweig étudient comment les conditions de vie peuvent modifier le cerveau de rats. Pour cela, certains sont placés dans un milieu dit enrichi : ils restent en groupe dans une grande cage, avec accès à des jouets et activités variés (roues, échelles, tunnels…). Chaque jour, ils sont autorisés à explorer un labyrinthe pendant trente minutes. Les autres sont mis dans des cages individuelles, où ils n’ont aucun contact avec leurs congénères. Après quatre-vingts jours de ce régime, les animaux ont été sacrifiés et leur cerveau disséqué.
Plasticité cérébrale
Les chercheurs ont alors constaté que le milieu enrichi avait fait l’effet d’un engrais neuronal. « Les rats développent un cortex plus épais, leurs neurones se ramifient, s’entourent de vaisseaux sanguins cérébraux plus nombreux et produisent des concentrations plus élevées de neurotransmetteurs comme l’acétylcholine ou de facteurs de croissance commele BDNF », résume la neuroscientifique Wendy Suzuki, de l’université de New York, dans Cerveau & Psycho (juillet-août 2016).
Depuis, grâce au concours de multiples rongeurs soumis à toutes sortes d’entraînements sportifs, d’autres équipes ont affiné ces résultats, montrant que si les interactions sociales sont stimulantes, les mouvements jouent un rôle important dans la plasticité cérébrale.
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