- CHŒUR ACCENTUS
The a cappella Recordings
Œuvres de Poulenc, Strauss, Rachmaninov…
On doit sans doute à Laurence Equilbey, la fondatrice du Chœur Accentus en 1991, l’acte de (re)naissance en France de la musique chorale a cappella. En quelques décennies, l’entreprenante chef de chœur a non comblé un vide mais créé un engouement discographique et surtout révélé au public des pans entiers d’un répertoire jusqu’alors confidentiel de Poulenc, Richard Strauss et Rachmaninov. A l’origine de nombreuses créations contemporaines (Dusapin, Manoury, Matalon, Maresz, Stroppa, Mantovani...), Laurence Equilbey a surtout cartonné avec les fameux albums de Transcriptions de 2003 et 2008 : l’« Adagietto » de la Cinquième Symphonie de Mahler par Gérard Pesson, Chopin peaufiné par Franck Krawczyk, sans oublier Wagner, Ravel, Debussy, Barber, Prokofiev, Les Quatre saisons de Vivaldi ou La Jeune fille et la Mort de Schubert. Il n’était que justice que Naïve réunisse enfin ces trésors dans un coffret célébrant les 25 ans d’Accentus. M.-A. R.
5 CD Naïve. 15 euros*.
- DAVID BOWIE
Who Can I Be Now ? (1974-1976)
Deuxième coffret d’une série anthologique commencée en 2015, Who Can I Be Now ? s’intéresse à l’inspiration soul et funk de David Bowie. L’objet a de l’allure, avec ses albums sous pochette cartonnée, un épais livret avec photographies et détails sur les différents enregistrements, la plupart remasterisés. On y retrouve Diamond Dogs, Young Americans et le grand œuvre Station To Station accompagnés des enregistrements en public des tournées 1974 et 1976. En complément, une première version de l’album Young Americans intitulée The Gouster et 1 CD de raretés. S. Si.
12 CD ou 13 vinyles Parlophone/Warner Music. 125 euros (CD), 245 euros (vinyle).
- KATE BUSH
Before The Dawn
Du 26 août au 1er octobre 2014, dans la prestigieuse salle londonienne de l’Hammersmith Apollo, Kate Bush était de retour à la scène, trente-cinq ans après une précédente tournée. Plutôt qu’un répertoire de ses succès, la chanteuse britannique a conçu un programme en trois actes, avec en particulier deux suites musicales, The Ninth Wave et A Sky of Honey avec des récitatifs qui relient certains thèmes. La bande-son, pop expérimentale et exigeante, a été mise dans un bel emballage cartonné, et accompagnée d’un livret qui donne une idée de ce qu’a pu être visuellement le spectacle de cette artiste rare. S. Si.
3 CD ou 4 vinyles Fish People/Warner Music. 21 euros (CD), 58 euros (vinyle).
- MILES DAVIS
Freedom Jazz Dance – The Bootleg Series vol. 5
L’un des moments de la courbe incomparable de Miles Davis (ou alors, comparable à celle de Picasso), c’est son second quintette 1964-1968. Lui, né en 1926, déjà bardé de cent chefs-d’œuvre. Eux, Herbie Hancock (claviers), Wayne Shorter (saxophone), Ron Carter (contrebasse), Tony Williams (batterie), « young lions » de 19 à 30 ans. Carrière faite, ils remettent tout en jeu. A leur droite, rock et pop diluviens ; à leur gauche, la téméraire « New Thing ». Le second quintette est un des moments de la musique afro-américaine inégalé, inégalable, ahurissant. Expérimentation ? Avant-garde ? Mise en garde ? Pas le moins du monde : un fantastique terrain d’amusement, le mot est de Wayne Shorter, dont le secret est perdu. Ce coffret rassemble séances de studio, conversations, essais, variantes. Vu l’exploration des terres inconnues, les inédits sont aussi passionnants que les versions connues. Francis Marmande
3 CD Columbia-Legacy/Sony Music. 22 euros.
- LUDOVICO EINAUDI
[elements] Box
Depuis la parution de son premier enregistrement, Time Out (1988), il a vendu des millions d’albums. Si certains restent dubitatifs face à un tel engouement, ne trouvant que peu de saveur dans sa musique, beaucoup d’autres font de lui un sculpteur d’images sonores sans égal, et louent son aptitude à créer d’envoûtants climats émotionnels. En juin, le pianiste et compositeur italien a été joué sur la banquise, pour la campagne d’alerte de Greenpeace autour de l’impact du réchauffement climatique sur l’océan Arctique. Sa composition Elegy for The Arctic est ajoutée en bonus à cette édition spéciale de [elements], ainsi que le film d’un concert au Royal Festival Hall de Londres. Patrick Labesse
1 CD et 1 DVD Ponderosa/PIAS. 33 euros.
- MATTHIAS GOERNE
Schubert : Lieder
Depuis 1997 et son premier Voyage d’hiver schubertien, le fils spirituel du grand Dietrich Fischer-Dieskau est devenu l’un des meilleurs Liedersänger de sa génération. Voix de miel et de bronze, il touche aujourd’hui au bout du titanesque et magistral périple schubertien entrepris en 2007 pour Harmonia Mundi. Un parcours jalonné de beautés singulières, au service d’une interprétation hors normes. Un jeu subtil entre intériorité et éloquence, une voix sensible mais sans afféterie, une finesse d’expression qui captive et émeut quand elle n’est pas carrément bouleversante : Goerne atteint à la souveraine liberté que confère la pleine possession de moyens superlatifs – un art consommé de la moindre inflexion, dans l’immédiateté charnelle du son, dans l’écume jaillissante du mot. Un grand, un très grand Schubert. M.-A. R.
12 CD Harmonia Mundi. 35 euros.
- KEITH JARRETT
A Multitude of Angels
Enregistrés, mixés, produits, sélectionnés, pensés sous l’influence de Georges Gurdjieff (1866-1949), par Keith Jarrett en personne (beau texte de présentation, mégalomaniaque pour les maniaques de sa haine, simplement intelligent, pour les autres), les quatre CD de ce coffret enchaînent des solos joués en sept jours à Modène, Ferrare, Turin, Gêne (du 23 au 30 octobre 1996). Pour le grand public, les solos de Keith Jarrett commencent avec le Köln Concert (1975). Pour les amateurs, avec Facing You (1971). Pour le voyageur, au Lincoln Center, New York, en juillet 1973 (scène partagée avec le big band de Gil Evans et le quintette de Sonny Rollins, mazette…) Ici, quand les anges s’arrêtent en Italie, ils commencent à tout instant. Un jour, on saura ce que représente cette prodigieuse capacité d’invention, de dépense physique et de renouvellement. Preuve par quatre. F. M.
4 CD ECM/Universal Music. 32 euros.
- JULIETTE
Intégrale des albums
L’année 2016 est celle de tous les honneurs pour la chanteuse Juliette, Grand Prix de la chanson française (catégorie créateur-interprète) de la Société des auteurs-compositeurs et éditeurs de musique (Sacem), Prixd’honneur de l’Académie Charles-Cros pour l’ensemble de sa carrière. Et sa discographie est rééditée pour les fêtes avec plusieurs raretés et inédits. S’y déploient son talent de compositrice et mélodiste, son attachement à la chanson réaliste, à des sujets sociaux traités avec intelligence, des situations drôles, absurdes, des personnages aussi tendres qu’inquiétants, la collaboration fructueuse avec l’auteur Pierre Philippe, ses propres textes, des atmosphères musicales variées. Quelques repères : les débuts, seule au piano dans La Première Cassette (1987), Irrésistible (1993), Rimes féminines (1996), le fastueux Festin de Juliette (2002), Bijoux et babioles (2008)… S. Si.
14 CD Polydor/Universal Music. 30 euros.
- KING CRIMSON
Radical Action (To Unseat The Hold of Monkey Mind)
La formation à sept musiciens, dont trois batteurs, du groupe de rock progressif-expérimental King Crimson, a été constituée en 2013. Elle a déjà enregistré deux albums lors de concerts. En voici un troisième, en 3 CD, 2 DVD et 1 Blu-Ray, dans lequel est présentée une trentaine de compositions et improvisations du groupe mené par le guitariste et claviériste Robert Fripp. Soit une version de chaque morceau joué lors d’une tournée en 2015 en Europe, au Canada et au Japon. L’interprétation est toujours impressionnante de rigueur et de précision, par des croisements rythmiques, mélodiques et harmoniques, constructions complexes, évolutions de passages doux à des déferlements sonores… Le mixage 5.1 des DVD et Blu-Ray en fait entendre au mieux les détails et subtilités. S. Si.
3 CD, 2 DVD et 1 Blu-Ray Panegyric-Discipline Global Mobile. 45 euros.
- GIDON KREMER
Complete Concertos Recordings on Deutsche Grammophon
Celui que Karajan avait surnommé « le meilleur violoniste du monde » au Festival de Salzbourg en 1975 s’est illustré pour ses lectures iconoclastes de la musique et du monde. Il n’était que justice qu’à la veille des 70 ans du Letton (le 27 février 2017), sa maison de disques lui rende un hommage. Entre Philip Glass et Vivaldi, Alfred Schnittke et Bach, l’infatigable « Didi » a sauté sur tout ce qui bouge musicalement, aventurier friand de nouveautés, qui fédéra dès 1981 l’un des foyers musicaux les plus décoiffants du moment : le Festival d’été de Lockenhaus, en Autriche, donnant naissance, en 1997, à la fameuse Kremerata Baltica. Si l’iconoclasme du violoniste dans le grand répertoire (Mozart, Beethoven, Mendelssohn, Tchaïkovski, Berg et Bartok) peut parfois surprendre, on retrouvera avec bonheur l’expressivité sauvage d’un musicien au service des musiques de son temps. M.-A. R.
22 CD Deutsche Grammophon/Universal Music. 55 euros.
- YVONNE LEFÉBURE
Une légende du piano
Œuvres de Bach, Mozart, Beethoven, Fauré, Ravel, Schumann, Chopin, Liszt.
Elle fait toujours référence dans les propos de maints pianistes français qui semblent trouver dans le jeu de cette ancienne élève d’Alfred Cortot et de Marguerite Long de quoi nourrir leur amour d’un style à la française dépourvu de toute joliesse ou afféterie. Yvonne Lefébure (1898-1986), c’est avant tout un tempérament impétueux, une tornade déferlant sur la musique. Sur Beethoven, qu’elle fait sonner avec une autorité sauvage, sur la grâce vive d’une anthologie fauréenne de haut vol, sur les rares sonatines de Maurice Emmanuel. Du Concerto de Schumann, qui fut l’amour de sa vie, trois versions. Un inédit de 1955, qui emporte tout sur le passage de l’orchestre de Pierre Dervaux, un autre avec Georges Sébastian, ainsi que la fameuse gravure de 1970 avec Paul Paray, où la pianiste semble au bord de la sortie de route. Il y a forcément des moments moins heureux, mais l’ensemble soulève l’enthousiasme, d’autant plus que la reproduction d’entretiens radiophoniques savoureux (dont une Radioscopie de 1976 avec Jacques Chancel) donne l’impression d’avoir toujours connu l’inoubliable grande dame du piano. M.-A. R.
24 CD FY/Solstice. 69 euros.
- LED ZEPPELIN
The Complete BBC Sessions
De 1969 à 1971, Led Zeppelin participa à plusieurs séances d’enregistrements pour des émissions de la BBC, dont une partie avait déjà été publiée en 1997. Le gardien du temple et guitariste Jimmy Page en a supervisé la réédition, agrémentée d’inédits, le tout aux normes actuelles de rendu du son. On suit ainsi l’évolution du groupe, partant du blues de ses débuts pour devenir l’une des plus puissantes formations de l’histoire du rock. A cet égard, l’émission « In Concert » du 1er avril 1971 au Paris Theatre de Londres est un document précieux. S. Si.
3 CD ou 5 vinyles ou édition « super deluxe » avec CD et vinyles BBC-Atlantic/Warner Music. 25 euros (CD), 80 euros (vinyle), 130 euros (« super deluxe »).
- IBRAHIM MAALOUF
10 ans de Live !
Un coffret pour marquer les 10 ans de l’irrésistible ascension du trompettiste pluridisciplinaire (Victoires du Jazz en 2010 et 2013, Victoire de la musique, catégorie « Musiques du monde », en 2014), qui provoque des affluences dignes d’une pop-star. Une somme d’images, choisies dans des captations de concerts filmés à Istanbul, Vienne, Nantes et Paris (émouvant duo avec Juliette Gréco, à l’Olympia), entre 2013 et 2016. Le musicien n’avait pas encore sorti de DVD, c’est dire si les fans, comblés, vont jubiler. D’autant que la boîte rouge renferme un CD et un DVD « best of » (comprenant des inédits filmés) et une clé USB avec deux heures de bonus et d’archives remontant à 2006. Pratique pour les addicts qui peuvent ainsi emporter leur idole partout avec eux, sans s’encombrer. P. La.
6 DVD, 1 CD et 1 clé USB, Mi’ster Productions/Universal Music. 73 euros.
- GÉRARD MANSET
Mansetlandia
Le plus littéraire des chanteurs français encore en activité et un de ceux qui a su le mieux marier sa langue aux plus nobles ambitions de la culture rock. Dans un pavé blanc, voici non pas l’intégrale des enregistrements du voyageur en solitaire mais la somme de ses albums, soit 16 références, de l’opératique Mort d’Orion (1970) au récent Opération Aphrodite, autour des obsessions antiques de Pierre Louÿs. Manset a mis en page le riche livret associant à ses photos la reproduction des paroles. Ne figure pas le premier 45-tours, Animal on est mal, qui fit connaître le musicien en 1968 grâce à sa diffusion en boucle pendant la grève de l’ORTF. La chanson est pourtant proposée deux fois, mais dans les versions qu’en ont donné Alain Bashung en 1996 pour l’album-hommage Route Manset – curieusement ajouté à l’ensemble –, puis l’auteur en compagnie du groupe rock belge dEUS en 2014. Frustration largement compensée par un volume d’inédits (autour de 1972) justifiant l’achat à lui seul. Bruno Lesprit
19 CD Parlophone/Warner Music. 84,90 euros.
- ENNIO MORRICONE
Io, Ennio Morricone
Grâce à ses compositions pour les westerns de Sergio Leone, il a acquis la reconnaissance du grand public. A l’heure où il vient de fêter ses 88 ans, ce coffret rappelle qu’en soixante ans de carrière, l’homme n’a pas chômé. A son palmarès figurent beaucoup de musiques de films (genre qu’il dit considérer comme un art « appliqué et contraint, qui s’adresse à un public de culture moyenne »), mais également des pièces pour piano solo (interprétées ici par Gilda Buttà), de la musique de chambre (aux pupitres, l’ensemble Musica d’Oggi, dirigé par Andrea Morricone, le fils du maestro) et de la musique symphonique (interprétée par l’Orchestra dell’Accademia Nazionale di Santa Cecilia, à Rome, dirigé aussi, sur certaines œuvres, par Morricone fils). P. La.
4 CD Milan Music/Universal Music. 40 euros.
- WOLFGANG AMADEUS MOZART
- The New Complete Edition
Une valeur sûre. Quand bien même le prétexte qui préside à cette nouvelle édition de l’intégrale de l’œuvre de Mozart – le 225e anniversaire de sa mort, en 1791, qui pourrait tout aussi bien être le 260e anniversaire de sa naissance en 1756 ! – paraît bien tiré par les cheveux. Qu’importe, cette somme incontestable de 200 CD issus de l’écrémage des catalogues Deutsche Grammophon et Decca, ainsi que de la Fondation Mozarteum de Salzbourg, est accompagnée de deux ouvrages didactiques. L’un présente une nouvelle biographie de Mozart selon le chercheur historien Cliff Eisen. L’autre éclaire de notices explicatives chacune des œuvres – musique de chambre, opéra et musique vocale, musique sacrée et répertoire symphonique. On se réjouira que cette mouture 2016 ait intégré les interprétations des baroqueux sur instruments anciens (Christopher Hogwood, Neville Marriner, Frans Bruggen, Christophe Rousset, Ottavio Dantone…), que certaines aient été gravées sur des instruments ayant appartenus à Mozart, tandis que des inédits témoignent de la recherche musicologique la plus récente. M.-A. R.
200 CD et 2 livres Decca Classics, Deutsche Grammophon et Stiftung Mozarteum Salzburg. 350 euros.
- RICCARDO MUTI
The Verdi Collection
Reconnu comme l’un des grands chefs verdiens de notre temps, Riccardo Muti a toujours affirmé ses affinités électives avec le grand compositeur italien, dont il s’est attelé à rendre noblesse et authenticité après des décennies de « mauvaises habitudes ». On se rappelle du traditionnel contre-ut qu’il refusa au ténor Salvatore Licitra à la fin de l’air du Trouvère « Di quella pira » en 2000 à La Scala,au prétexte qu’il n’était pas écrit dans la partition. A la tête de l’Orchestre Philharmonia ou de celui de La Scala, en live ou en studio, Muti a gravé des pépites. A commencer par l’Aïda de 1974 (Caballé, Domingo, Cossotto) ou le Nabucco de 1978 (Ghiaurov, Scotto). Pour le reste – La Traviata, Rigoletto, La Forza del destino, Macbeth, I Vespri siciliani… – il faut aussi compter avec les distributions : la décevante prestation de Pavarotti dans Don Carlo en 1992 est ainsi heureusement compensée par le magnifique Philippe II de Samuel Ramey. M.-A. R.
28 CD et 1 DVD Warner Classics. 65 euros.
- ANDRÉ NAVARRA
The Cello
Œuvres de Saint-Saëns, Lalo, Brahms, Kodaly, Prokofiev, Bloch, Khatchatourian, Bruch, Martin, Elgar, Carl Philipp Emanuel Bach, Dvorak, Schumann.
André Navarra (1911-1988) est connu pour avoir formé pendant trente ans plusieurs générations de violoncellistes au Conservatoire de Paris. Mais c’est le merveilleux interprète d’Elgar et de Dvorak que ce coffret nous permet de redécouvrir avec bonheur. Elégance, noblesse sans emphase, générosité dans l’expression, l’art de Navarra est ici ressuscité grâce aux archives enregistrées entre 1955 et 1966 par Warner, Supraphon, Capitol, etc., subtilement remastérisées. Une Symphonie concertante de Prokofiev particulièrement imaginative, des Concertos de Saint-Saëns et Lalo avec Munch et l’Orchestre Lamoureux, un « Double » de Brahms avec le violoniste Josef Suk, et pour la première fois, un Concerto de Schumann de grande classe avec Barbirolli. M.-A. R.
6 CD Fondamenta/Phoenix. 34 euros.
- MURRAY PERAHIA
Bach : The Complete Recordings
Bach est entré dans la vie de Murray Perahia par la grâce d’un pouce blessé et mal soigné qui a obligé le pianiste virtuose à interrompre momentanément sa carrière au début des années 1990 et lui a permis de revenir à ses fondamentaux. L’Américain s’en est donné à cœur joie, des Suites anglaises (1998 et 1999) aux Partitas dix ans plus tard, en passant par les concertos (avec l’Academy of Saint Martin in The Fields, qu’il dirige du clavier) enregistrées dans la foulée des monumentales Variations Goldberg de l’an 2000. A chaque fois, les belles épousailles de la dynamique et du chant, un toucher poétique, une sonorité à la fois puissante et recueillie, un art dégagé des interférences du monde, des époques et des modes. Un Bach éternel en quelque sorte. M.-A. R.
8 CD Sony Classical. 35 euros.
- LEONTYNE PRICE
Prima donna assoluta
Fort tempérament et voix d’exception, celle qui restera la plus grande Aïda du XXe siècle a marqué de son empreinte incandescente la majeure partie des rôles qu’elle a abordés. Après des récitals gravés en deux coffrets, Sony sort la presque intégrale des opéras enregistrés par la diva américaine. Il y a Verdi bien sûr, encore et toujours : une Forza del destino de 1964 à se damner, Un ballo in Maschera de 1966 en état de grâce – Price y déploie ses moyens félins, des aigus paradisiaques, un medium de folie douce –, Ernani, en compagnie d’un Carlo Bergonzi au meilleur. Et Le Trouvère de 1969 avec Domingo sous la direction exaltée de Zubin Mehta. On pourra arguer que cette Aïda de 1970 n’est pas la meilleure des deux (l’autre, de 1962, est chez Decca), que sa Fiordiligi dans le Cosi fan tutte de Mozart et plus encore une Madame Butterfly curieusement enivrée d’elle-même ne font point référence. Mais quelle puissance de séduction dans cette Carmen sous la direction de Karajan, de sensuelle délectation dans cette Tosca grand luxe avec Domingo, sans oublier, Puccini toujours, le terrifiant combat de titans que se livrent une Giorgetta fulgurante dans Il Tabarro, entre le Michele de Milnes et le Luigi de Domingo. M.-A. R.
22 CD Sony Classical. 80 euros.
- LOU REED
The RCA & Arista Album Collection
Icône parmi les plus influentes du rock, l’ancien leader du Velvet Underground a connu une carrière solo au succès erratique. La faute, sans doute, à l’instabilité d’un tempérament et à des prises de risques ayant souvent désarçonné la critique et les fans. La réécoute de ses 16 premiers albums, inclus dans ce coffret consacré à sa période sur les labels RCA et Arista, comprise entre 1972 et 1986, permet de retrouver des triomphes éclatants (Transformer, produit par David Bowie), des chefs-d’œuvre maudits (Berlin), des live épiques (Rock’n’roll Animal, Take No Prisoners), une inécoutable provocation (Metal Machine Music), des quêtes intrigantes (Street Hassle), quelques disques conventionnels (New Sensations) et des échecs commerciaux merveilleusement attachants (Coney Island Baby). Un très beau livret et quelques artefacts complètent ce coffret dont Lou Reed avait commencé à superviser la réalisation, avant sa mort en 2013. Stéphane Davet
17 CD RCA-Arista-Legacy/Sony Music. 130 euros.
- SUN RA
The Definitive 45’s Collection, 1952-1991
En 1996, Evidence Records avait rassemblé dans un double CD une part méconnue du claviériste, compositeur et chef d’orchestre Sun Ra, des enregistrements publiés au format 45-tours entre 1954 et 1982. Ce sont cette fois 3 CD, sur une période plus large, de 1952 à 1991, qui permettent de (re)découvrir ces curiosités. Le musicien et son orchestre, plus souvent perçus comme relevant du free jazz, donnent ici dans le doo-wop, le rhythm’n’blues, la romance avec chanteuses ou chanteurs, le cha-cha, le swing, se promènent dans des reprises diverses (Great Balls of Fire,It’s Christmas Time, A Foggy Day…) ou condensent en 2 à 4 minutes certaines de leurs improvisations « cosmiques » au long cours. Livret (en anglais) copieux en informations. S. Si.
3 CD Strut/Differ-ant. 28 euros.
- THE WHO
My Generation – Super Deluxe Edition
Paru en décembre 1965, le premier album des Who ne vaut pas seulement pour sa chanson titre, My Generation, devenue un des hymnes à la jeunesse les plus percutants de l’histoire du rock. Enregistré en trois sessions de 4 heures, le disque est un concentré d’énergie et d’arrogance fourni à un public de mods bourrés d’amphétamines. On y retrouve des reprises pète-sec de rhythm’n’blues (dont I Don’t Mind et Please Please Please de James Brown), mais aussi la rage, la subtilité (The Kids Are Alright), l’humour (It’s Not True) et les audaces à venir (The Ox) de Pete Townshend, songwriter en plein développement. Archiviste méticuleux de ses créations, ce dernier fournit suffisamment de matière musicale (plusieurs démos inédites), rédactionnelle et visuelle pour faire de ce coffret 5 CD au livret de 80 pages, un des musts de l’année. S. D.
5 CD Polydor/Universal Music. 90 euros.
- DIVERS ARTISTES
Christmas Georges Lang
Depuis le début des années 1940, pour les vedettes (et parfois moins vedettes) de la musique populaire anglo-saxonne, l’interprétation de chansons du répertoire de Noël est un passage obligé. Georges Lang, qui anime sur RTL l’émission « Les Nocturnes » – ainsi que d’autres programmes musicaux sur la station – en a sélectionné 77. Tous les genres sont abordés : jazz, grande variété, pop, rock, country, soul… et l’art de l’enchaînement de Georges Lang fait merveille. Cela débute avec Dean Martin pour se terminer avec l’orchestre de Nelson Riddle, en passant par Elvis Presley, Tori Amos, Diana Krall, Johnny et Rosanne Cash, Kylie Minogue, The Drifters, Ray Charles, les Jackson 5, Slade, Abba… S. Si.
4 CD Warner Music. 25 euros.
- Impulse ! - 1961-1974
Fondé début 1961, avec la parution de l’album The Great Kai and J. J. des trombonistes Kai Winding et Jay Jay Johnson, la compagnie phonographique Impulse ! a publié en moins de quinze ans plus de 400 albums. Si l’histoire du jazz retient souvent la collaboration avec le saxophoniste John Coltrane, Impulse ! s’intéressait à un large éventail de styles, du jazz classique au free. Ce que démontre le choix judicieux des 25 albums réunis dans ce coffret, avec notamment Art Blakey, Gil Evans (Into The Hot), Benny Carter, Duke Ellington avec Coleman Hawkins, Chico Hamilton (Passin’Thru), Coltrane avec le superbe Ballads, Charles Mingus, Oliver Nelson, Gato Barbieri ou Keith Jarrett (Death and The Flower). S. Si.
25 CD Impulse !-Verve Music Group/Universal Music. 52 euros.
- Mali Nø Førmat !
Douceur et plénitude, apesanteur et sérénité. De la musique qui fait du bien. Des albums pour prendre de la hauteur et s’évader. Les quatre albums maliens publiés par le label français Nø Førmat ! sont réédités en vinyle : At Peace, le subtil et délicat vagabondage du joueur de kora Ballaké Sissoko, Chamber Music et Musique de Nuit, ses conversations et tissages enchanteurs avec le violoncelliste Vincent Segal, et enfin, Kiriké, de Kassé Mady Diabaté, l’une des voix les plus étourdissantes du Mali. Quatre échappées belles réunies dans un coffret à l’esthétique sobre et soignée. Un code permettant de télécharger les albums est glissé à l’intérieur. P. La.
4 vinyles Nø Førmat !/Sony Music. 69 euros.
- Rhythm & Soul Basics
Les fondamentaux de la soul music, en quatre volumes de 2 CD chacun. Du numéro 1 au numéro 4, le parcours chronologique et stylistique (rhythm’n’blues, soul, funk et disco, nu soul…) débute en 1951 par Rocket 88 mis au crédit de Jackie Brenston et Ike Turner pour aller jusqu’à 2015 avec The Hills par The Weeknd. De l’un à l’autre, les succès et leurs interprètes célèbres abondent, avec ici et là des perles par des interprètes moins connus (The Cadillacs, Helene Smith, Joe Simon, Willie Hutch…). Un court texte de Thomas Blondeau, auteur du récent Hip-hop, une histoire française (Tana, 224 pages, 35 euros), accompagne chaque morceau – la typographie nécessite de bons yeux. S. Si.
4 volumes de 2 CD ou de 3 vinyles MCA/Universal Music. 13 euros (CD), 20 euros (vinyle).
- Splendeurs de Versailles
Œuvres de Lully, Anglebert, Lambert, Chambonnières, Le Roux, Campra, Louis et François Couperin, Marais, Moulinié, Charpentier, Clérambault.
La fine fleur des spécialistes de la musique du Grand Siècle entre 1999 et 2013 est au rendez-vous de cette passionnante évocation des fastes de la cour versaillaise. Certains, qui débutaient, ont fait depuis un sacré chemin : l’ensemble Les Correspondances que dirige Sébastien Daucé. Si d’aucuns ont pris leurs distances avec la vie musicale (Il Seminario musicale), la plupart sont toujours et heureusement à pied d’œuvre – Le Poème Harmonique de Vincent Dumestre, Capriccio Stravagante et Skip Sempé, Céline Frisch et Café Zimmermann. Marc-Antoine Charpentier trône à la table baroque ? Les autres convives n’en sont pas moins des poids lourds, de Lully à Clérambault, en passant par Chambonnières, Campra, Marin Marais, Louis et François Couperin. M.-A. R.
10 CD Alpha. 35 euros.
* Contrairement au livre, il n’y a pas de prix unique pour le disque. Le prix mentionné est indicatif, moyenne constatée, début décembre, en magasins et sur des sites de vente en ligne.
Voir les contributions
Réutiliser ce contenu