On avait déjà signalé en Libye des phénomènes de violence, d’extorsion et de travail forcé, mais le trafic d’êtres humains est désormais tellement normal qu’on vend des gens en public. “On peut ajouter les ‘marchés aux esclaves’ à la liste des horreurs qui se passent en Libye”, déclare Mohammed Abdiker, qui dirige le département des opérations et des situations d’urgence de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM). “Plus l’OIM se penche sur la Libye, plus nous apprenons que c’est une vallée de larmes pour de trop nombreux migrants.”

Ce vaste pays peu peuplé d’Afrique du Nord est un des principaux points de sortie pour les réfugiés africains qui tentent de gagner l’Europe par bateau. Or depuis le renversement de l’autocrate Muammar Kadhafi [en 2011], la Libye a basculé dans la violence et le chaos et les migrants, qui n’ont que peu d’argent et en général pas de papiers, sont particulièrement vulnérables.

Un Sénégalais de 34 ans a expliqué avoir traversé le désert depuis le Niger dans un car affrété par des passeurs. Les passagers avaient payé pour être conduits à la côte, d’où ils prévoyaient de tenter de passer en Europe en bateau. Tout d’un coup, le chauffeur leur a déclaré que les intermédiaires ne lui avaient pas donné sa commission et les a mis en vente à Sebha, dans le sud de la Libye.

“Les hommes ont été amenés sur une place, ou un parking, où se tenait une sorte de marché aux esclaves. Il y avait des gens du coin – le jeune homme les décrit comme des Arabes – qui achetaient des migrants subsahariens”, poursuit Livia Manente, qui tr