Amenra - La Gaîté Lyrique - Paris - 13/01/2018 - Compte-rendu de concert - Live report

CECI EST MA CHAIR
A la Gaîté Lyrique, Amenra s'adresse au coeur, aux tripes et à l'âme.

Cela fait un peu plus de deux ans depuis le dernier passage d'Amenra à Paris. Deux années bien remplies pour les membres du groupe belge, entre famille, concerts acoustiques et nombreux projets parallèles. Deux années d'attente également pour que les conditions soient propices à l'enregistrement du nouvel album, "Mass VI". Album que je n'ai pas encore écouté car j'attends pour cela d'avoir vu le concert de ce soir. D'ailleurs j'achète l'album sur place au stand de merchandising. Le stand est installé dans l'espace situé entre la salle de concert et le foyer de l'Impératrice Eugénie. Si l'espace en question est décoré de manière moderne, le foyer est lui décoré à l'ancienne, avec des lustres, des colonnes de marbre, du parquet, un bar et des fauteuils pour se détendre. Ainsi que cinq bustes (Schiller, Racine, Beaumarchais, Molière, Shakespeare) posés en face des cinq fenêtres qui composent le haut des cinq arcades de la façade de la Gaîté Lyrique. Le mélange des genres est savoureux. Après ce rapide tour des lieux, nous nous dirigeons ma femme et moi vers la salle de concert. Nous découvrons un lieu contemporain et fonctionnel. Le temps de prendre des nouvelles des amis présents et c'est le début du concert d'Amenra (nous avons raté NNRA en première partie).

Nous sommes placés loin de la scène. Le sol étant résolument horizontal et les membres du public étant de belle taille, nous allons nous concentrer ce soir sur l'aspect visuel global de la prestation et sur le son (la console est, point positif, située juste derrière nous). D'entrée le son est extraordinaire. Tout est limpide. Nous entendons les doigts qui glissent sur les cordes. Chaque guitare est identifiable. La basse est parfaitement séparée de la batterie. Une prouesse car cette netteté s'allie, marque de fabrique du groupe, à une sensation de masse sonore écrasante. D'où nous sommes nous ne voyions que très peu le jeu de scène des musiciens. Nous apercevons Colin qui chante, comme à l'accoutumée, la majeure partie du concert dos au public. Pas de bonjour, pas d'au revoir, pas de discours, pas de merci, pas besoin. La musique se suffit à elle-même. C'est mon cinquième concert d'Amenra et j'en redemande. Je note quelques différences sensibles par rapport aux précédents concerts. Ce soir l'ambiance est clairement moins brutale. Les prestations pour les albums "Mass IV" et "Mass V" étaient écrasantes, comme des coups au corps. Amenra offre aujourd'hui des temps de respiration, très marqués, entre chaque morceau. Comme si, après la période du deuil et de la colère, il devenait possible de vivre avec la douleur. Ces régulières accalmies dans le rythme ont pour effet immédiat de décupler la lourdeur du riff lorsque revient la stupéfiante masse sonore générée par le groupe. Le chant lui aussi est plus varié. Délaissant par moment ses hurlements déchirants, Colin, visiblement conforté par ses récentes prestations en chant clair, s'essaye à de douces mélopées. Un texte en français ajoute à la singularité du propos. Amenra reste dans son univers tout en explorant de nouvelles voies. L'arrivée du bassiste Leny dans le groupe n'est sans doute pas pour rien dans le sentiment de fraîcheur qui se dégage. Leny qui ajoute d'ailleurs sa voix de très belle manière à celle de Colin sur "Nowena | 9.10". Les trois morceaux du dernier album joués ce soir passent très en concert. Un immense fond de scène diffuse tout au long du concert des images en noir et blanc, typiques d'Amenra. Sous-bois, jeune femme, chien, animaux morts, croix, églises, herbes, eau, bord de mer et toujours les puissantes visions du béton rongé des amas de bunkers de la seconde guerre mondiale. L'ombre d'Andreï Tarkovski hante ces visions, jusqu'au plan final de cette jeune femme dont le corps se libère de la gravité et s'élève dans les airs. Fin du concert. Force, maîtrise et amour. Intense et magnifique.

Setlist :

1. Boden
2. Plus Près De Toi (Closer To You)
3. Razoreater
4. Children Of The Eye
5. Nowena | 9.10
6. Aorte. Nous Sommes Du Même Sang
7. Terziele
8. Am Kreuz
9. Diaken