Près de 500 000 des nouveaux cas de cancer survenus en 2012 chez des adultes – soit 3,6 % du nombre total des cancers dans le monde – seraient liés à un surpoids ou une obésité, selon une vaste étude publiée dans The Lancet Oncology, le 26 novembre. Melina Arnold (Centre international de recherche sur le cancer, Lyon) et ses collègues soulignent que le tribut est particulièrement lourd pour les pays riches : deux tiers de ces tumeurs associées à un excès de poids sont recensées chez des patients vivant en Europe ou aux Etats-Unis.
Un indice élevé de masse corporelle (ou IMC, poids divisé par la taille au carré), c’est-à-dire supérieur à 25, est un facteur de risque bien identifié de pathologies chroniques telles les maladies cardio-vasculaires, le diabète, l'arthrose... De multiples études scientifiques ont aussi confirmé l'association entre le surpoids et des cancers, notamment de la sphère digestive (œsophage, côlon, rectum, pancréas), du rein, et (chez la femme après la ménopause) du sein, de l'ovaire et du corps de l'utérus (par opposition au col).
Plusieurs facteurs
Ces liens peuvent s'expliquer par plusieurs facteurs : le surpoids favorise la prolifération des cellules, et une inflammation chronique... Des modifications hormonales seraient en cause dans certaines localisations, par exemple pour les cancers du sein et de l’utérus.
La situation est en tout cas d'autant plus inquiétante que la fréquence de l'obésité et du surpoids est en constante augmentation depuis les années 1980. A l'échelle mondiale, plus d'un tiers de la population est désormais concernée par un excès de poids (dont 12 % par une obésité).
Pour estimer l'importance de ce facteur de risque dans la survenue des cancers à travers le monde, l'équipe de Melina Arnold a travaillé sur plusieurs sources, dont Globocan, une base de données du CIRC qui livre les estimations les plus récentes pour 28 types de tumeur dans 184 pays. Les chercheurs ont ainsi calculé, dans chaque pays, la fraction des cancers survenus en 2012 attribuable au surpoids observé dix ans plus tôt, en 2002.
Les femmes plus touchées
Les résultats sont éloquents : au total, 3,6 % des nouveaux cas de tumeur maligne des adultes, soit 481 000, seraient en lien avec un IMC élevé. La proportion est significativement plus importante chez les femmes (5,4 %) que chez les hommes (1,9 %), en raison surtout du nombre élevé de cancers spécifiquement féminins (utérus, sein) après la ménopause.
Sans surprise, une grande hétérogénéité géographique est constatée, les pays en voie de développement étant, en tout cas pour l'instant, nettement moins touchés par les cancers « poids dépendants » que les pays riches. Dans ceux où le niveau de vie est le plus élevé, environ 8 % des cancers féminins et 3 % des tumeurs masculines sont associées à un excès de poids, la proportion étant respectivement de 1,5 et 0,3 % dans les pays les plus pauvres.
Derrière les infections et le tabac
Les auteurs appellent toutefois à des efforts globaux dans la lutte contre l'obésité, car si l'épidémie se stabilise dans certaines régions (Etats-Unis par exemple), elle continue de progresser dans bien d’autres : Amérique latine, Caraïbes et Afrique du Nord principalement.
Par comparaison, le nombre de cancers attribuables à des infections (hépatite B, papilloma virus...) est de l'ordre de 2 millions de nouveaux cas par an, soit 16 % du total des tumeurs, rappellent Melina Arnold et ses collègues. Le tabac serait, lui, impliqué dans 20 % des tumeurs, et 1,4 millions de décès annuels par cancer. Autant de tumeurs malignes potentiellement évitables par des politiques publiques de prévention et une amélioration des comportements individuels.
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