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Vous n'avez rien suivi à l'affaire Benalla? On vous la résume en 7 questions

Le 1er mai dernier, Alexandre Benalla était filmé en train de frapper et violenter des individus place de la Contrescarpe à Paris. Une commission d'enquête parlementaire tente cette semaine d'éclaircir son rôle, les raisons de sa présence et la réaction du sommet de l'Etat à la découverte des vidéos.

Qui est Alexandre Benalla et pourquoi en parle-t-on? En six jours, ce proche collaborateur d'Emmanuel Macron a été projeté sur le devant de la scène après la diffusion de deux vidéos datant du 1er mai, où il frappe et violente des manifestants tout en portant des signes (casque, brassard, radio) l'identifiant comme un policier - ce qu'il n'est pas.

Que s'est-il passé?

Le 1er mai 2018, une petite centaine de personnes se trouvent place de la Contrescarpe, dans le Ve arrondissement de Paris, en marge des manifestations. Les CRS, d'abord stationnés à quelques pas rue Mouffetard, interviennent. Un homme identifié comme Alexandre Benalla, protégé par un casque de policier - et portant un brassard "Police" sur d'autres images du même jour -, s'en prend à une femme qu'il tente à deux reprises de mettre à terre, avant de l'immobiliser. Cette séquence a été diffusée dans un deuxième temps, vendredi 20 juillet.

Peu après, l'homme se dirige vers les CRS qui tentent de maîtriser un manifestant. Alexandre Benalla s'approche de l'homme déjà immobilisé, le saisit, à un moment par le cou, avant de le frapper à plusieurs reprises et de le mettre violemment au sol. Cette séquence a été filmée puis diffusée par Le Monde sur son site mercredi 18 juillet, qui a identifié le collaborateur d'Emmanuel Macron.

Qui est Alexandre Benalla?

  • Chargé de la sécurité d'Emmanuel Macron pendant la campagne présidentielle (après avoir travaillé pour plusieurs figures du Parti socialiste comme Martine Aubry, François Hollande ou Arnaud Montebourg), Alexandre Benalla est devenu chargé de mission auprès du Président. Et non adjoint au chef de cabinet du Président, comme il se présentait pourtant sur sa carte de visite

Voiture équipée de dispositifs policiers, appartement dans une dépendance de l'Elysée, haut grade dans la réserve citoyenne… Ce membre de la garde rapprochée disposait de nombreux avantages et assurait un rôle pour le moins ambigu, dévoilé au fil des nombreuses révélations. D'après des informations recueillies par BFMTV, Alexandre Benalla travaillait notamment à un nouveau projet sécurité qui aurait réuni les différents services en charge de la sécurité du chef de l'Etat.

Quelles questions posent ces images?

A la diffusion de la première vidéo mercredi 18 juillet, plusieurs questions se posent. Qui est cet homme? Pourquoi porte-t-il des éléments réservés aux policiers (casque, brassard, radio) s'il ne l'est pas? A-t-il été sanctionné pour ces violences? Et, après avoir été identifié comme un collaborateur d'Emmanuel Macron, le Président était-il au courant de ces actes?

Pourquoi Alexandre Benalla était-il avec les CRS?

Selon l'autorisation délivrée par l'Elysée, Alexandre Benalla accompagnait les CRS à des fins d'observation "pour voir comment se gérait une grande manifestation". "ll m'en a demandé l'autorisation, je la lui ai donnée, mais en précisant bien qu'il y allait en observateur", a expliqué Patrick Strzoda, directeur de cabinet du Président au Monde. Au courant dès le 2 mai, celui-ci a convoqué le collaborateur sur le champ et prévenu Emmanuel Macron, alors en déplacement en Australie.

Le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb a confirmé ce lundi, entendu par une commission d'enquête de l'Assemblée nationale, qu'il a été mis au courant des faits dès le 2 mai "en début d'après-midi". Le ministre a déclaré qu'il estimait que c'était au préfet de police et au cabinet d'Emmanuel Macron d'agir une fois la vidéo connue.

Quelle a été la réaction de l'exécutif?

Le jeudi 19 juillet, le porte-parole de l'Elysée Bruno Roger-Petit a annoncé qu'à l'identification d'Alexandre Benalla sur les images du 1er mai, ce dernier avait été sanctionné par une mise à pied de 15 jours sans salaire et rétrogradé à des fonctions d'organisation internes à l'Elysée.

Une version mise à mal par la découverte de nombreux clichés où Alexandre Benalla apparaît au côté d'Emmanuel Macron lors de déplacements à l'extérieur du palais, ou dans de grands événements comme l'entrée au Panthéon de Simone Veil. Lundi 16 juillet, il a par exemple accompagné le retour des Bleus en France et se trouvait à bord de leur bus sur les Champs-Elysées, Christophe Castaner avançant sur notre antenne qu'il était "en charge de la logistique des bagages".

Jeudi 19 juillet, Gérard Collomb a annoncé avoir saisi l'IGPN, la police des polices, afin de faire la lumière sur la présence d'Alexandre Benalla en compagnie des CRS. Le syndicat Vigi CGT Police a par ailleurs porté plainte pour "usurpation de fonction" et "usurpation de signe réservé à l'autorité publique".

Vendredi 20 juillet, l'Elysée a annoncé avoir engagé une procédure de licenciement à l'encontre d'Alexandre Benalla. Via son entourage, Emmanuel Macron a fait savoir dimanche qu'il jugeait "inacceptables" les violences reprochées à son collaborateur et assuré qu'il n'y aurait "pas d'impunité".

  • Alexandre Benalla va-t-il être poursuivi?

Placé en garde à vue vendredi, Alexandre Benalla a été mis en examen dimanche 22 juillet pour violences en réunion, immixtion dans l'exercice d'une fonction publique, port sans droit d'insignes réglementés et recel de détournement d'images, ainsi que pour recel de violation du secret professionnel. Vincent Crase, un gendarme réserviste qui l'accompagnait le 1er mai, a aussi été mis en examen pour violences en réunion, immixtion dans l'exercice d'une fonction publique et port d'arme prohibé.

Trois autres policiers ont été mis en examen pour détournement d'images issues d'un système de vidéo-protection et violation du secret professionnel. Les cinq ont été placés sous contrôle judiciaire.

Que s'est-il passé en Commission? 

La Commission d'enquête de l'Assemblée peut convoquer toute personne qu'elle estime liée à l'affaire, comme le ministre de l'Intérieur lundi matin. Les premières auditions ont donné lieu à une passe d'armes surprenante entre le ministre de l'Intérieur Gérard Collomb et le préfet de police, Michel Delpuech.

Le ministre s'est dédouané d'une quelconque faute dans la gestion de l'affaire Benalla et s'est défaussé sur le préfet de police et sur le directeur de cabinet d'Emmanuel Macron. Gérard Collomb dit avoir été informé le 2 mai, "en début d'après-midi", par son cabinet de l'existence de la vidéo. Mais il a estimé que ce n'était pas à lui de saisir la justice de ces actes, qu'il a de nouveau condamnés "avec la plus grande fermeté", mais "à ceux qui sont en responsabilité de leurs administrations". 

Le ministre de l'Intérieur a affirmé s'être "assuré que tant le cabinet du président de la République que le préfet de police avaient été destinataires de l'information" et que c'était "à eux de prendre les sanctions et éventuellement d'informer les autorités judiciaires". 

Le préfet de police Michel Delpuech a contesté ce point de vue, rappelant être "sous l'autorité des autorités exécutives". Après avoir appris l'existence de la vidéo le 2 mai, il affirme avoir contacté le ministère de l'Intérieur, avant 11h (contrairement à ce que le ministre affirme), qui lui a répondu être "déjà en liaison" avec la présidence de la République, a-t-il rapporté. Dès lors, "il était établi pour (lui) que le sujet Benalla était traité par l'autorité hiérarchique dont il dépendait". Comme le relève Le Monde, les deux versions sont compatibles mais supposent que le cabinet du ministre de l'Intérieur a mis quatre heures avant de prévenir Gérard Collomb. 

Ce dernier a par ailleurs contesté connaître Alexandre Benalla, dont il ignorait les fonctions même s'il l'a forcément "croisé" lors de la campagne électorale d'Emmanuel Macron. Le préfet a pour sa part assuré que ce chargé de mission à l'Elysée "était un interlocuteur connu".

La Commission d'enquête de l'Assemblée auditionnera mardi le directeur de cabinet de l'Elysée, Patrick Strzoda, et son homologue de l'Intérieur, Stéphane Fratacci, augurant d'une plongée inédite dans les arcanes du pouvoir.

Selon Public Sénat, la chambre haute du Parlement entendra le ministre de l'Intérieur mardi. Seront également auditionnés le préfet de police de Paris, le chef du service de protection, les représentants des syndicats de policiers, le directeur général de la police nationale, le Défenseur des droits Jacques Toubon, ainsi que toute personne susceptible d'apporter des éléments. 

Liv Audigane, avec AFP