Jura. Loin de Lubrizol, la révolution sur le marché des lubrifiants déjà en marche dans le Jura

La start-up Afuludine, déjà présente en magasins de bricolage, espère convaincre l'industrie d'abandonner l'huile au profuit un lubrifiant moléculaire.

Fabrice Lallemand, ici avec Florian Charrier, responsable de production et R & D, a pour projet de conquérir le marché des lubrifiants avec un outil plus proche de l'industrie pharmaceutique que de la chimie lourde. / Fabrice Lallemand annonce pour le marché des professionnels le lancement d'une gamme baptisée Afupro.
Fabrice Lallemand annonce pour le marché des professionnels le lancement d’une gamme baptisée Afupro.
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À la suite de l’incendie qui a ravagé une partie de l’usine Lubrizol de Rouen, Fabrice Lallemand, PDG de l’entreprise doloise Afuludine n’a pas observé un soudain et massif mouvement vers la solution de repli que sa jeune entreprise pouvait leur proposer. Cela ne le surprend pas :

Pour celui qui est habitué à utiliser un produit huileux, le premier réflexe est de chercher une autre huile ».

Et puis, à Rouen, Lubrizol ne produisait pas de lubrifiants mais des additifs entrant dans la composition du produit fini. La filière pétrolière a su s’organiser pour compenser l’arrêt de production sur le site normand.

L’accident industriel n’a pas non plus eu de répercussion sur la stratégie de la start-up doloise. « On est encore en phase d’itération, c’est-à-dire qu’on teste pour voir où le marché répond », explique l’inventeur du procédé qui consiste à réduire l’usure par frottement des surfaces métalliques grâce à une pellicule moléculaire déposée à l’aide d’une simple solution hydroalcoolique.

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Afuludine a fait, pour son développement, le choix du bouche-à-oreille. « Dans l’industrie, c’est très long de convaincre. Pour gagner du temps, il faut que ce soient les clients qui nous contactent parce qu’ils ont entendu parler de nous », explique Fabrice Lallemand.

Ni gants ni masques

L’incendie de l’usine Lubrizol a cependant montré, si besoin était, l’urgence d’évoluer vers une industrie plus sûre, tant pour le milieu naturel que pour les populations. « Aujourd’hui, tout le monde a la volonté de faire mieux pour notre planète. L’incendie de Lubrizol est un élément de plus qui oblige à réfléchir à ce qu’il faut faire pour y arriver ». Plutôt que sur un problème ponctuel d’approvisionnement, c’est sur cette prise de conscience que mise Afuludine.

La partie production d’Afuludine occupe un atelier au sein du Centre d’Activité Nouvelles du Grand Dole, à peine quelques centaines de mètres carrés de superficie. Des cuves de 20 litres alimentent les deux réacteurs d’où sort une poudre blanche qui se manipule sans besoin de porter ni masque ni gants. « La chaîne est entièrement inerte : aucun rejet de gaz ou de liquide », souligne Fabrice Lallemand.

Pour l’instant, Afuludine expédie à ses clients un produit prêt à l’emploi. Pour cela, elle dilue la molécule dans une solution d’éthanol. Afin de diminuer les volumes à transporter, et ainsi réduire encore l’impact environnemental, cette étape pourrait se faire au niveau des sucreries ou chez le client. Comme le procédé ne nécessite pas de grosses infrastructures, la start-up pourrait même choisir comme modèle économique la vente de licences d’exploitation de son invention. Le marché serait ainsi alimenté grâce à des répliques du prototype mis au point à Dole implantées au plus près des lieux d’utilisation. Et le chercheur de conclure :

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On voit bien qu’on n’expose pas du tout aux mêmes risques que l’industrie chimique classique, tout en étant capable de fournir un produit en grande quantité ».

Fabrice Lallemand, ici avec Florian Charrier, responsable de production et R & D, a pour projet de conquérir le marché des lubrifiants avec un outil plus proche de l'industrie pharmaceutique que de la chimie lourde.
Fabrice Lallemand, ici avec Florian Charrier, responsable de production et R & D, a pour projet de conquérir le marché des lubrifiants avec un outil plus proche de l’industrie pharmaceutique que de la chimie lourde. (©Voix du Jura / B. I)

Bricoleurs et cyclistes déjà adeptes

Avec un outil plus proche de l’industrie pharmaceutique que de l’industrie pétrolière, Afuludine incarne la révolution en cours dans l’univers de la chimie. « La chimie sert à dépolluer, elle invente de nouveaux matériaux. C’est cela que les étudiants qui choisissent cette filière viennent chercher », assure Fabrice Lallemand, qui continue à enseigner à l’université de Besançon.

Afuludine a reçu en 2016 le prix Entreprises et Environnement décerné par le ministère de l’Écologie et l’ADEME et, en 2018, le trophée dans la catégorie Product and Services à l’European Business Award for the Environment.

Les plus rapides à se convertir au lubrifiant non huileux ont été les magasins de bricolage. On s’y procure les produits d’Afuludine sous la marque Onyx. D’ici le printemps, un nettoyant et un lubrifiant pour les chaînes de vélo seront commercialisés sous la marque Winsleek. Sans perdre de vue sa cible première qui est l’industrie mécanique, Fabrice Lallemand se verrait bien également vendre son lubrifiant écologique aux motards…

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