ARTE - SAMEDI 26 OCTOBRE - 20 h 50 - DOCU-FICTION
Depuis le 16 octobre, la Conciergerie accueille une exposition consacrée à la reine Marie-Antoinette qui, devenue « la veuve Capet », y vécut ses derniers jours. Exposition qui dissèque les métamorphoses d’une image princière devenue au fil des réappropriations une icône et quasiment une pop star, via les mangas et le cinéma. Optant pour une fiction dont est bannie toute spéculation romanesque, Alain Brunard choisit d’offrir le récit scrupuleusement documenté des 76 jours que la reine passa dans les geôles du palais de la Cité.
Du 2 août 1793, date de son transfert du Temple, au 16 octobre, qui voit le tribunal révolutionnaire la condamner à mort et l’envoyer à l’échafaud, le récit, qui adapte le livre d’Emmanuel de Waresquiel, Juger la reine (Tallandier, 2016), est mené par la voix off de Denis Podalydès. Peu de dialogues donc et un silence qui isole et souligne le fossé qui sépare la souveraine déchue de ceux qui doivent statuer sur son sort, dans les premiers actes de l’évocation carcérale – seule la reconstitution du procès donne au verbe sa place primordiale –, et cela rend l’ensemble justement oppressant.
Force d’interprétation
L’option crépusculaire choisie par l’historien est parfaitement rendue et le choix des éclairages autant que la sobriété de la mise en scène donnent à l’évocation dramatique une efficacité que le jeu des comédiens sert au plus juste. Peut-être l’articulation en cinq actes, pour classique qu’elle soit, trahit-elle une faiblesse dans le rythme de la dramatique.
Vie quotidienne en prison, ultime tentative d’évasion, atermoiements des conventionnels embarrassés par cette prisonnière hors du commun dont ils ne savent que faire, tout conduit abruptement au temps fort le plus saisissant, celui qui voit Marie-Antoinette face à ses juges. On peut contester l’option de Waresquiel qui tient l’événement pour le premier grand procès politique de la Terreur – celui des Girondins, quinze jours plus tard, se prépare bien plus tôt et sanctionne un coup d’Etat contre la représentation nationale autrement plus grave. Mais la force de l’interprétation de Maud Wyler, qui, malgré le mutisme qui l’enferme, parvient par son maintien, son élégance, à imposer la majesté de la captive, donne à la victime l’incarnation subtile qui détricote les légendes, noire comme dorée, qui la dénaturent d’ordinaire.
Marie-Antoinette, Ils ont jugé la reine, docu-fiction réalisé par Alain Brunard (Fr., 2019, 106 min).
www.arte.tv/fr/videos/079390-000-A/marie-antoinette-ils-ont-juge-la-reine/
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