EDF plombé par les dettes que lui doit l’Etat !

Illustration. Le principal producteur d'énergie européen accumule les difficultés financières. 
Illustration. Le principal producteur d'énergie européen accumule les difficultés financières.  LP/Aurélie Ladet

    Journée noire pour EDF sur les marchés : l'action de l'électricien français a perdu 12,7% en bourse hier. Une sorte de « jeudi noir » qui s'inscrit dans une année déjà très difficile, avec un titre en baisse de 27% depuis le janvier. Et même une chute encore plus vertigineuse de -60% sur trois ans.

    Les raisons ? La dernière dégringolade concerne l'annonce par la direction d'EDF d'une nouvelle dégradation de ses résultats financiers pour la deuxième année consécutive. Le groupe est déjà plombé par une dette abyssale. Officiellement chiffrée à 37,5 milliards d'euros par le truchement d'opérations comptables, elle atteindrait dans la réalité le double, soit près de 74 milliards d'euros.

    La gestion hasardeuse de l'actionnaire principale

    Mais cette mauvaise nouvelle n'est que l'arbre qui cache la forêt. Plus globalement, les évolutions malheureuses du cours de bourse sont en fait l'expression de la débâcle financière que vit actuellement le premier producteur européen d'électricité. Elle serait le fruit, selon les analystes financiers, d'une gestion calamiteuse du groupe. Peu aidé il est vrai par l'Etat, son principal actionnaire (à 85,6%), qui navigue à vue au gré des changements de sensibilité politique. D'autant que ce dernier trouve en plus le moyen de ne pas rembourser ses dettes.

    Une ardoise de six milliards d'euros s'est ainsi accumulée en l'espace de sept ans. Comment est-ce possible ? Pour financer la mission de service public assurée par EDF, une taxe spéciale a été créée en 2003 : la CSPE (Contribution au service public de l'électricité), prélevée directement sur la facture des 35 millions de Français abonnés à l'électricité. Cette taxe représente aujourd'hui en moyenne 110 euros par an et par foyer. Et elle augmente chaque année de 15 euros supplémentaires.

    A quoi sert la CSPE ? A financer notamment le développement des énergies renouvelables. EDF a en effet obligation de racheter à bas prix l'électricité à ceux qui produisent à partir de l'éolien ou du solaire. La CSPE étant censée compenser la différence avec le prix du marché. Sauf que l'essor de ce type d'énergie est tel ces dernières années qu'EDF a dû avancer les fonds en puisant dans sa trésorerie. Et n'a de cesse depuis d'en réclamer le remboursement par l'Etat. D'autant que les intérêts pèsent chaque année de plus en plus lourd.

    En 2013, un premier plan de remboursement a été mis en place pour étaler la dette jusqu'en 2018. Mais devant la propension des pouvoirs publics à ne pas verser chaque mois les montants prévus, un second échéancier a été fixé par un arrêté du 2 décembre dernier, donnant cette fois-ci comme date butoir 2020.

    Échéancier après échéancier...

    Pour la petite histoire, EDF a auparavant obtenu du gouvernement un écrit en date du 26 janvier 2016 dans lequel ce dernier s'engage cette fois-ci «fermement» à respecter ce nouvel échéancier. Résultat : EDF a été remboursé cette année de 293,3 millions d'euros, au titre de la dette sur la CSPE. Mais dont un tiers (99,3 millions) ne concerne que les intérêts associés ! Et s'il venait à l'Etat l'envie encore une fois de ne pas tenir ses engagements, de nouveaux intérêts de retard viendraient s'ajouter à ceux déjà existant, au taux actuel de 1,72%.

    Dernier détail : un amendement, adopté sans débat dans la nuit du 7 au 8 décembre dans le cadre du Projet de loi de Finances rectificative (PLFR) 2016, pourrait dès 2017 obliger l'Etat à rembourser EDF les frais de gestion occasionnés par cette fameuse obligation de rachat de l'électricité renouvelable. Le montant ? 40 millions d'euros supplémentaires par an. Qui seront ponctionnés... sur la CSPE.