Tribune. Le 15 août, sous le regard sidéré de la communauté internationale, les talibans prenaient le contrôle de Kaboul, capitale de l’Afghanistan et siège d’une université quasi centenaire, cible répétée d’attentats meurtriers au cours des dernières années. La menace sur la sécurité et la liberté des Afghans, et en particulier des femmes afghanes, nous a saisis d’effroi.
C’est donc avec une attention inquiète, que nous, membres de la communauté étudiante et universitaire, avons lu la lettre écrite par la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation aux chefs d’établissement, le 23 août.
Un lieu de refuge et d’épanouissement
Nous espérions une prise de position à la hauteur de la catastrophe – à la hauteur aussi de l’espérance de nos camarades et collègues, étudiants, enseignants, chercheurs, professeurs, qui ont fui, fuient aujourd’hui et continueront de fuir le nouveau régime en place en Afghanistan, solidaire enfin de tous ceux et toutes celles qui traversent les frontières pour espérer trouver en France un lieu de refuge et d’épanouissement, d’exercice de leur libre conscience et de leurs capacités critiques.
Mais tout ce que le ministère propose, c’est un bricolage improvisé dans l’urgence, un appel vide de tout moyen, sans considération aucune pour les étudiants afghans et les étudiantes afghanes d’ores et déjà présents sur le territoire et maltraités par l’institution universitaire. Dans sa lettre aux chefs d’établissement, Frédérique Vidal enjoint de « faciliter les inscriptions, mettre en place des solutions d’accueil et d’hébergement » pour les étudiants afghans.
Or, si les exilés afghans sont empêchés d’accéder à l’enseignement supérieur, c’est d’abord à cause du coût des études. Car la mal nommée « Bienvenue en France », cette réforme portée en 2018 par le cabinet Vidal, a érigé un mur d’argent entre les étrangers non communautaires et l’université. Une personne fuyant les balles des talibans doit ainsi payer à son arrivée en France 2 770 euros pour entrer en licence, 3 770 euros pour entrer en master.
Un soutien réel à ces étudiants exige la suppression pure et simple de Bienvenue en France, cette machine à sélection par l’argent, ainsi que de toutes les politiques d’hostilité qui ont rendu la vie des étudiants étrangers invivable. L’arbitraire des délivrances de visas, l’introduction d’un délai de carence à la Sécurité sociale, la difficulté de renouvellement des titres de séjour en préfecture, les conditions de ressources exorbitantes ou la limitation du droit au travail des étudiants sont autant de freins au droit aux études qui vont contre les valeurs les plus élémentaires de la communauté universitaire et étudiante.
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