Les sanctions adoptées au niveau européen dans la foulée de l’invasion russe de l’Ukraine devaient aussi toucher le secteur aérien. Lundi 28 mars, l’ultimatum lancé à la Russie par les sociétés européennes de location d’avions arrivait à son terme : les compagnies aériennes russes devaient restituer les quelque 500 avions loués. Mais, “du côté européen, on a eu beau scruter le ciel à l’horizon : aucun avion loué aux Russes n’a été restitué ces derniers jours. En fait, cela faisait déjà des semaines que les loueurs du Vieux Continent ne se faisaient plus aucune illusion”, explique La Libre Belgique.

Le quotidien belge, soulignant le montant faramineux des biens ainsi spoliés − environ 10 milliards d’euros −, évoque en titre de son article le “casse du siècle dans le ciel russe”.

Confrontée aux sanctions occidentales, la Russie a tout simplement promulgué une loi autorisant les compagnies aériennes du pays à saisir les appareils et à les immatriculer sur le territoire. Elles pourront ainsi continuer à les utiliser. Comme le précise La Libre, “en tout début de crise, quelques avions avaient été saisis dans des aéroports étrangers et le risque est grand pour les compagnies aériennes russes de se faire confisquer leurs aéronefs s’ils quittent leur territoire”.

Selon les données du ministère des Transports russe, au début du mois, plus de la moitié des quelque 1 350 avions civils russes étaient immatriculés à l’étranger. En tout 515 appareils appartiendraient à des loueurs, pour la plupart implantés en Irlande. L’immense majorité de ces avions est toujours en Russie ou en Biélorussie, par crainte des saisies en cas d’atterrissage à l’étranger.

Un manque de pièces détachées

L’opération ne devrait pourtant faire que des perdants. La Libre souligne que les compagnies russes risquent d’éprouver des difficultés à faire voler ces appareils à moyen terme. En effet, ceux-ci nécessitent un entretien rigoureux pour répondre aux normes de sécurité internationales. Les constructeurs Boeing et Airbus ayant suspendu leurs activités en Russie, le pays pourrait très vite manquer de pièces détachées et de personnel qualifié pour assurer la maintenance.

Du côté des loueurs et des assureurs, les pertes potentielles sont énormes et les poursuites judiciaires ont toutes les chances de s’éterniser. Dans le cas − très improbable − où les sociétés occidentales venaient à récupérer leurs avions, l’opération ne serait pas non plus indolore, précise le magazine économique américain Fortune. “Si les compagnies aériennes russes continuent d’exploiter des appareils qui ne leur appartiennent pas sans l’accord de leurs propriétaires étrangers, les loueurs d’avions risquent de perdre leur accès aux documents de bord et aux dossiers de maintenance. Ils devront alors dépenser des millions de dollars pour reconstituer ces dossiers et procéder à des contrôles de sécurité extrêmement poussés. Passer l’avion par pertes et profits coûtera peut-être moins cher.”