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Guerre en Ukraine: la crainte du trafic d’armes

L’envoi massif d’armes occidentales en Ukraine ravive l’inquiétude sur leur possible détournement.

Temps de lecture: 4 min

Et si elles tombaient entre de mauvaises mains ? L’envoi massif d’armes occidentales en Ukraine ravive l’inquiétude sur leur possible détournement, dans un pays connu pour avoir été une plaque tournante de ce trafic à la fin des années 1990.

Risque de prolifération d’armes

« Il y a un risque très important lié à la prolifération d’armes en Ukraine en ce moment, notamment en ce qui concerne les armes légères et de petit calibre, telles que les armes à feu », souligne Nils Duquet, directeur du Flemish Peace Institute.

Depuis le début de l’offensive militaire russe en Ukraine le 24 février, plusieurs pays occidentaux, Etats-Unis en tête, ont annoncé la livraison d’armes lourdes comme légères en soutien à Kiev pour l’aider à se défendre face aux troupes russes.

Washington a – entre autres – fourni ou promis des centaines de « drones suicides » Switchblade, 7.000 fusils d’assaut, 50 millions de balles et munitions diverses, des roquettes à guidage laser, des drones Puma, ou encore des radars anti-artillerie et anti-drones.

Or, si ce soutien à Kiev est parfaitement « compréhensible », il est indispensable d’évaluer les « conséquences sécuritaires » d’un tel transfert d’armes, insiste le Stimson Center, un cercle de réflexion américain.

« Nous avons vu à maintes reprises comment des armes visant à aider un allié dans un conflit se sont retrouvées sur les lignes de front de champs de bataille imprévus, souvent entre les mains de groupes en désaccord avec les intérêts américains ou ceux de civils », met en garde ce centre dans une note publiée en mars.

« Cela est particulièrement vrai pour les armes légères et de petit calibre, qui présentent certains des risques les plus élevés de perte, de détournement vers le marché illicite ou d’utilisation abusive », ajoute-t-il.

L’Ukraine, plaque tournante du trafic d’armes dans les années 90

Au vu de l’histoire récente de l’Ukraine, le risque de détournement est loin d’être fictif. Après l’effondrement de l’Union soviétique, de nombreuses armes ukrainiennes avaient en effet été détournées vers d’autres pays et d’autres zones de conflit.

En 2014, l’invasion de l’Ukraine par la Russie s’accompagne d’un nouveau pillage du stock d’armes et de munitions ukrainiennes, notamment dans l’Est et en Crimée.

Au total, au moins 300.000 armes légères et de petit calibre ont ainsi été pillées ou perdues entre 2013 et 2015, selon le projet de recherche Small Arms Survey (SAS) de l’Institut de hautes études internationales et du développement de Genève. Seules 4.000 ont été depuis retrouvées.

Mais contrairement aux flux vers l’étranger constatés à la chute de l’Union soviétique, le trafic après 2014 s’est concentré principalement à l’intérieur de l’Ukraine, nourrissant le marché noir, selon le SAS.

L’une des explications « pourrait résider dans le fait que la demande d’armes légères est restée élevée en Ukraine après 2015, ce qui pourrait être en partie lié au conflit non résolu dans l’est du pays et à l’anxiété générale à l’égard des conditions de sécurité locales », relève Matt Schroeder, chercheur du programme.

Selon lui, « récupérer ces armes et les éliminer correctement » constituera un véritable « défi ».

Manque de transparence

Aux Etats-Unis, la question de la surveillance de l’utilisation finale des armes envoyées en Ukraine avait été soulevée avec inquiétude dès 2020 par l’inspecteur général du Pentagone.

Des ONG ont également tiré la sonnette d’alarme, à l’image du Center for Civilians in Conflict (Civic), qui pointe un manque « de transparence sur les mesures d’atténuation des risques ou de surveillance que les États-Unis et les autres pays envoyant des armes à l’Ukraine ont prises ».

Même flou concernant « les garanties obtenues pour assurer la protection des civils face à ces gigantesques transferts », estime Annie Shiel du Civic, qui préconise entre autres « l’ajout explicite d’obligations en matière de droits de l’homme dans les conditions de vente » d’armes ou encore de « veiller à ce que tout transfert d’armes contienne de solides procédures de suivi ».

Un tâche jugée délicate selon certains, voire impossible. « C’est une illusion de penser que dans un contexte de guerre, on peut contrôler les armes qui circulent », estime Nils Duquet qui, tout en « comprenant » le soutien à Kiev, s’inquiète des conséquences à terme.

En ex-Yougoslavie, « les armes qui étaient utilisées il y a trente ans le sont toujours », note-t-il. « Donc ces armes que vous voyez en Ukraine en ce moment, elles resteront dans la région, entre les mains de toutes sortes de personnes, des organisations criminelles ou autres ».

Confirmation d’un haut gradé français, un peu effrayé par cette perspective. « Quand on verra des braquages de banque au (missile américain) Javelin, on va moins rigoler », fait-il remarquer à l’AFP.

 

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4 Commentaires

  • Posté par Martin Roland, mardi 17 mai 2022, 15:15

    Les collabos poutinophiles se reconnaissent aussi facilement que les lièvres dans les phares d'une bagnole pendant une nuit d'été.

  • Posté par massacry olivier, mardi 17 mai 2022, 19:32

    Au fait quel est le point commun encore entre l'Ukraine et l'Afganistan? Allez un petit effort !

  • Posté par Martin Roland, mardi 17 mai 2022, 15:16

    Je préfère un comédien plutôt qu' une crapule comme poutler.

  • Posté par Van Oystaeyen Damien, mardi 17 mai 2022, 15:14

    Ronald Reagan aussi était un comédien. Cela n'en fait pas un clown. C'est le propre d'une démocratie d'avoir pour élus des personnes issues de la société civile (et non des services de sécurité).

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