Cover Maurice Pialat - Commentaires

Maurice Pialat - Commentaires

Une expression viscérale et sans compromis ; une approche de l’humanité dont la puissance émotionnelle ne passe par aucun sentimentalisme ; un style écorché et fiévreux qui n’appartient qu’à lui. Pialat est l’un des plus grands cinéastes français, et s’il se revendique de Renoir et de Bresson, son ...

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Liste de

10 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a plus de 4 ans

L'Enfance nue
7.6

L'Enfance nue (1969)

1 h 23 min. Sortie : 22 janvier 1969. Drame

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Écorché, maladroit, instable, tout en rage rentrée, François, neuf ans, est un petit frère d’Antoine Doinel. On ne s’étonnera donc pas que Truffaut ait produit ce premier film, mais c’est bel et bien Pialat que l’on reconnaît d’emblée ici, dans la dureté rude, la profonde sympathie pour ceux qu’il filme, l’admirable hauteur du regard. Sans développer aucune thèse, le cinéaste montre la difficulté des structures sociales et administratives à comprendre la psychologie des enfants qu’elle prend en charge, mais aussi l’insatiable affection offerte par un couple de retraités, le désarroi face aux blessures qui ne cicatrisent pas, la chaleur exhalée par un foyer provisoire (et par l’adorable mémère), l’irréductible solitude de l’orphelin malgré l’amour qu’il reçoit et celui qu’il voudrait offrir. Superbe film.
Top 10 Année 1968 :
http://lc.cx/2ir

Nous ne vieillirons pas ensemble
7.4

Nous ne vieillirons pas ensemble (1972)

1 h 50 min. Sortie : 3 mai 1972. Drame

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Il y a de toute évidence une bonne part d’autoportrait dans cette chronique âpre et cruelle des affres de la vie en couple, qui saisit par ces éclats d’authenticité et ce souci de la vérité intime des êtres qui traverseront toute l’œuvre ultérieure de l’artiste. Le monde de Pialat est celui de la solitude, de la séparation, de l’abandon, celui des choses qui ne s’arrangent pas longtemps, des temps morts, des ratages. Il dessine ici une carte du Tendre dénuée de toute complaisance, dont l’aridité est tempérée par de brusques accès de colère ou de tendresse, et s’attache à tous les moments en creux, à toutes les respirations amères, tristes et violentes qui marquent la fin d’une relation amoureuse. Un film intimiste porté par deux très grands acteurs, et qui réussit la gageure d’être de son temps et politique sans montrer son engagement.
Top 10 Année 1972 :
http://lc.cx/AUa

La Gueule ouverte
7.3

La Gueule ouverte (1974)

1 h 26 min. Sortie : 8 mai 1974. Drame

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Deux ans auparavant, Bergman sortait "Cris et Chuchotements". Non plus dans un manoir bourgeois mais dans une morne maison prolétaire, le réalisateur livre ici sa vision, éprouvante, austère, de la maladie et de la mort inéluctable, en recensant de manière extrêmement concrète la variété des comportements autour de l’agonisante. Pas facile d’aimer cette œuvre volontairement exigeante dans la manière dont elle fixe la dissolution d’un corps, la souffrance physique, l’insupportable impuissance de ceux qui l’entourent – un époux rustre qui noie sa détresse dans l’alcool, un fils seul cherchant à oublier sa douleur dans l’amour charnel, une bru partagé entre compassion et dégoût. Le regard de Pialat est intraitable ; face à lui, j’oscille de l’implication à la distance, parfois au cours d’une même séquence.

Passe ton bac d'abord
6.8

Passe ton bac d'abord (1979)

1 h 26 min. Sortie : 29 août 1979. Comédie dramatique, Romance

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

L’adolescence nue. Pour réussir cette chronique des paumés du secondaire, Pialat filme sans complaisance mais non sans tendresse le quotidien de garçons et de filles ni beaux ni laids, ni heureux ni malheureux. Chez ces jeunes Chtimis ce n’est pas l’opulence ni la misère, ils ont l’âme vague comme un terrain et leur existence est grise comme leur ville, Lens. Alors ils se retrouvent au bistrot à essayer de savoir pourquoi ils vivent aujourd’hui et ce que sera demain, ils couchent ensemble surtout pour se tenir chaud au cœur et au corps. Le chômage guette, le mariage n’est qu’un pis-aller lorsqu’il n’est pas carrément une erreur, mais ce constat douloureux est émaillé de douceur, d’humour et de chaleur, malgré la morosité des jours qui se suivent. C’est parfois dur, souvent touchant, toujours juste.

Loulou
6.9

Loulou (1980)

1 h 50 min. Sortie : 3 septembre 1980. Drame, Romance

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Une bourgeoise quitte un bourgeois pour se réfugier sous le corps vigoureux d’un loubard. Elle se réservera le droit de terminer l’aventure sans happy end et sans enfant. Avec cette autre tranche de mal de vivre, rugueuse et écorchée, Pialat autopsie un amour sans lendemain et met en relief les moteurs de la vie que sont le désir et le fric, l’opposition entre deux milieux sociaux, la réalité douloureuse des clivages qu’ils génèrent. La description du quotidien conjugal, le recours à une forme (faussement) naturaliste qui privilégie la caméra mobile, les plans-séquences dédiés aux formidables acteurs, l’authenticité des confrontations mises en scène (en premier lieu celle de la réunion de famille, gagnée par le malaise) font du film une réussite à la crudité intransigeante, pas forcément évidente à digérer.

À nos amours
7.4

À nos amours (1983)

1 h 39 min. Sortie : 16 novembre 1983. Drame, Romance

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Montant en première ligne du champ de bataille domestique, Pialat guette les possibilités de s’arracher à la pesanteur, empoigne la masse, traque la boue, le ciel bas, les plaies mentales et les élans corporels. Toute la matière brute de son cinéma atteint son expression la plus intense dans cette histoire d’un œdipe douloureux, où l’hostilité adulte, qui est aussi l’expression d’un amour infini, recule devant l’innocence à la fois mature et régressive de l’adolescente impudique – Sandrine Bonnaire, plus que prodigieuse. La sécheresse de l'épure n'empêche pas l'émotion de passer : bien au contraire, elle noue la gorge et met le coeur à l'envers. C’est le film définitif sur l’âge difficile où, d’enfant, on devient adulte, pris au piège de la famille, de la société, de la morale et de sentiments contradictoires, entre l’appétit de vivre et la crainte de s’engager.
Top 10 Année 1983 :
http://lc.cx/UyN

Police
6.6

Police (1985)

1 h 53 min. Sortie : 4 septembre 1985. Policier, Drame, Romance

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Lorsqu’il s’attaque au film dit policier, le cinéaste est évidemment (très) loin des stéréotypes du genre. De policier, le film n’a d’ailleurs que le titre, et le milieu rude qu’il décrit sans le moindre effet romanesque, arrachant au quotidien des morceaux de vérité brute, captant avec une promiscuité dénuée de vernis lissant la violence et la misère quotidiennes de quelques hommes et quelques femmes filmées dans leur solitude, leurs failles, leur médiocrité pour certains. Flics et voyous, dealers et proxénètes, putes et caïds font vivre une comédie humaine rude et imperméable aux lieux communs : ils sont tous du côté de la nuit, s’agitant dans le bocal bleuté du commissariat, saisis avec une proximité physique et réaliste qui fait fi du manichéisme, du suspense et de la tension dramatique.

Sous le soleil de Satan
6.7

Sous le soleil de Satan (1987)

1 h 38 min. Sortie : 2 septembre 1987. Drame

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Quelque chose m’a échappé dans cette adaptation palmée de Bernanos. Cette fois la rigueur et l’âpreté habituelles de Pialat confinent à la sécheresse, à l’ascétisme, à une certaine forme d’austérité : ce n’est pas un film gratifiant, ses effets étant constamment désamorcés, ses aspérités et ses confusions nourrissant toujours les maladresses de l’aventure spirituelle. Les doutes et la crise de foi de ce prêtre sont tangibles, ses tourments s’expriment dans l’entre-deux de la chute et de la grâce, au sein d’une transcription aride qui fait du monde un espace déshumanisé, hanté par le silence de Dieu et l’appel triomphant du démon, et l’œuvre se clôt en faisant tomber sur le spectateur comme une chape de plomb. Si la vision de l’artiste est sans compromis, elle m’a pour le coup un peu laissé sur le carreau.

Van Gogh
7.3

Van Gogh (1991)

2 h 38 min. Sortie : 30 octobre 1991. Biopic, Drame

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

S’il est peut-être le plus accompli du réalisateur, ce film magistral est aussi, probablement, le plus accessible. C’est un cinéma toujours aussi écorché, composé de fragments et d’éclats bruts, dans lequel la vie s’engouffre en bouffées suffocantes de fièvre et d’authenticité, mais il respire d’une lumière nouvelle. Il s’offre tel un chaos dompté, rompant totalement avec les canons de la biographie : pas de glorification artistique, pas de lyrisme fiévreux, simplement le portrait à la fois dépouillé et tumultueux d’un être fragile, incompris, épuisé par un trop-plein de vie intérieure. À la croisée du naturalisme et de l’impressionnisme, les tableaux renoiriens de climats champêtres, les flâneries en guinguette et les quadrilles bucoliques alternent avec les instants de doute, de remords, d’enthousiasme. Chef-d’œuvre.
Top 10 Année 1991 :
http://lc.cx/UPN

Le Garçu
7.1

Le Garçu (1995)

1 h 42 min. Sortie : 31 octobre 1995. Drame

Film de Maurice Pialat

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Avec la tendresse blessée et le refus du compromis qui l’ont toujours défini, Pialat cristallise la terreur de l’abandon et de la disharmonie affective : celle de ce père qui semble courir désespérément après le fils qu’il ne parvient pas à rejoindre. Tout son cinéma est convoqué, synthétisé, et en même temps remis à plat dans ce dernier film, magnifique interrogation sur la filiation, la paternité, la famille recomposée, qui charrie de puissants blocs d’humanité dans toute sa tendresse et sa cruauté, et qui renvoie l’essentiel du cinéma français dans la catégorie des gentils simulacres. Il arpente le territoire de la perte, des guerres incessantes, des amours gâchées, celui de la dépossession à tous les niveaux affectifs, où tout s’étiole irrémédiablement, tout se joue trop tard et nous échappe (la femme aimée, les êtres chers, l’enfant).

Thaddeus

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