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John Ford - Commentaires

Géant du cinéma américain, maître d’un genre mythique (le western) mais pas seulement, porteur surtout d’un humanisme généreux et universel, Ford est évidemment un réalisateur incontournable, auquel je suis extrêmement sensible. Mais comment ne pas l’être ?


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27 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a 6 mois

La Patrouille perdue
6.8

La Patrouille perdue (1934)

The Lost Patrol

1 h 13 min. Sortie : 26 juin 1935 (France). Aventure, Guerre

Film de John Ford

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

En racontant comme une petite escouade de soldats britanniques est retranchée et assiégée dans un oasis du désert de Mésopotamie, pendant la Première Guerre mondiale, le film se présente comme un lointain ancêtre des "survivals". Dans cet espace scénique traversé en diagonale par les troncs des palmiers et éclairé par une lumière rasante qui en accentue le relief, les soldats débitent des dialogues pathétiques ou grotesques avant de tomber un à un sous les balles d’Arabes invisibles. Ford se plie ainsi à un exercice non dépourvu d’intérêt : soumettre l’action aux nécessités d’une plastique contraignante et faire ressentir l’objectivisation d’une vision subjective. L’interprétation, menée par un Victor McLaglen tout de présence physique, rattrape la rigidité quelque peu sommaire de l’étude de caractères.

Le Mouchard
7.1

Le Mouchard (1935)

The Informer

1 h 31 min. Sortie : 13 septembre 1935 (France). Policier, Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

En exergue, une citation de l’Évangile évoquant le dilemme de Judas : c’est sur les affres de la culpabilité et de la trahison que se penche Ford, dans un style hérité de l’esthétique expressionniste qui tire le meilleur parti d’un décor dublinois reconstitué en des nappes de brouillard épais, des territoires de pénombre lugubre troués par des lumières solitaires, bas-fonds où se joue une sordide lutte d’influences politiques. Un colosse rustre se damne par amour, pauvre clochard affamé qui dilapide en une nuit avinée la solde de son infamie, se noie dans une faiblesse morale constamment rachetée par mille attentions dérisoires, pour finir jugé par un tribunal populaire sorti d’"M le Maudit". De la faute à la rédemption, la trajectoire de cet être pathétique et rebutant à la fois captive de bout en bout.

Je n'ai pas tué Lincoln
7.4

Je n'ai pas tué Lincoln (1936)

The Prisoner of Shark Island

1 h 36 min. Sortie : 28 février 1936 (États-Unis). Drame, Historique

Film de John Ford

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Ford est à cette époque en pleine évolution vers la maturité et voit son style s’épanouir, son idéologie "lincolnienne" s’exprimer sans détours, ses sujets (petits ou grands) se hausser peu à peu à la dimension épique et être passés au même pressoir d’idéalisme familier et chaleureux. Toutes ces caractéristiques semblent concentrées au sein d’une évocation historique aux vertus presque documentaires, qui emprunte à des registres divers allant du film du procès au prêche humaniste, en passant par le récit carcéral. C’est une très bonne pioche, car l’assurance de la mise en scène, rompue à l’efficacité dramatique, se double d’une vigueur sincère dans la dénonciation de l’injustice révoltante dont fut victime le personnage principal. Un beau film grave sur l’humilité, la loyauté et la persévérance.

La Chevauchée fantastique
7.6

La Chevauchée fantastique (1939)

Stagecoach

1 h 36 min. Sortie : 24 mai 1939 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Argument minimal, cadre serré, réduction des éléments à leur expression élémentaire : un huis-clos à six personnages dans une diligence lancée à toute allure sur les plaines désertiques de l’Ouest américain. Atteignant l’équilibre idéal entre l’action et la psychologie, le mouvement et l’analyse, la description caracolante des aventures traversées et la peinture minutieuse d’êtres momentanément réunis et solidairement marqués par le destin, Ford atteint ce classicisme que l’on pourrait résumer ainsi : une façon lumineuse d’alimenter le plaisir de spectateur à l’intelligence de la représentation. Pas de fioriture ni de temps mort, une scénographie et une typologie proches de l’abstraction, une dramaturgie sans fausse note respectant la règle des trois unités : en un mot, un western séminal.

Vers sa destinée
7.7

Vers sa destinée (1939)

Young Mr. Lincoln

1 h 40 min. Sortie : 17 août 1939 (France). Biopic, Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

C’est à un des premiers fait d’armes d’Abraham Lincoln que Ford s’intéresse ici, en empruntant de judicieux chemins de traverse et en évitant les ingrédients habituels : plutôt que la démonstration pontifiante ou le faste de l’épopée, il choisit l’humilité d’une chronique pastorale, avec ses beuveries, son concours de bûches fendues, sa fête dominicale, ses villageois modestes. Jambes interminables, pif refait et haut-de-forme ridicule, Henry Fonda y campe un futur président un peu gauche mais très malin, qui injecte à une seconde partie procédurière, véritable film de procès avant l’heure, une humanité tenace et un humour narquois tempérant l’hagiographie. Un opus attachant, où l’auteur nous réapprend qu’il n’y a pas d’art, de morale, de civilisation possibles ne s’enracinant dans l’intelligence et la bonté.

Sur la piste des Mohawks
6.8

Sur la piste des Mohawks (1939)

Drums Along the Mohawk

1 h 44 min. Sortie : 30 novembre 1944 (France). Drame, Historique, Romance

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

De tous les films de l’auteur, ce premier ouvrage en couleurs est l’un de ceux qui exposent de la manière la plus nette la bipolarité qui inscrit si fortement son œuvre dans la culture américaine, entre esprit de conquête et insécurité. Son grand talent est d’humaniser le principe de la colonisation en dotant ses personnages d’une naïveté, d’une innocence venant équilibrer l’avancée du mécanisme : nulle expérience de l’ailleurs qui ne se fonde sur le jardin d’enfance, nulle aventure sans prix à payer (maisons incendiées, cultures dévastées, communauté décimée par les combats). De cette épure transcendant les stéréotypes, de cette évidence qui est forme de présentation et matière même du propos, naît la plus vibrante émotion et se formulent avec grandeur des bribes d’explication sur l’Amérique contemporaine.

Les Raisins de la colère
7.9

Les Raisins de la colère (1940)

The Grapes of Wrath

2 h 09 min. Sortie : 31 décembre 1947 (France). Drame, Historique, Road movie

Film de John Ford

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Par son humanisme, son attachement à exalter la dignité des petites gens, Ford était appelé à rencontrer l’univers de Steinbeck. Il en atténue cependant la virulence contestataire en lui substituant sa simplicité de fils de paysan peu porté vers l’idéologie révolutionnaire. Comme il le fera souvent par la suite, il raconte l’errance d’une communauté poussée par la nécessité, ici celle des misérables de notre temps, et dessine une odyssée moderne de la terre promise qui rejoint le mythe mosaïque de l’Exode. Cette transposition du réalisme social dans l’allégorie, traduite en un noir et blanc magnifiquement composé, élève le mélodrame contemporain à des hauteurs immémoriales, dont la tirade finale de Jane Darwell porte le sens et la valeur : "On est vivants. On est le peuple qui survit à tout. Nous avançons toujours."
Top 10 Année 1940 :
https://urlz.fr/kefd

Les Hommes de la mer
7.3

Les Hommes de la mer (1940)

The Long Voyage Home

1 h 45 min. Sortie : 14 février 1945 (France). Drame, Policier, Guerre

Film de John Ford

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Ne pas s’attendre à une exaltation romantique de l’aventure maritime ou à un récit chargé de ferveur métaphysique. Loin de Conrad ou de Melville, le réalisateur adapte quatre pièces d’Eugene O’Neill, écrivain sans doute bien plus proche de sa sensibilité, et raconte dans un style anti-épique le voyage dans lequel, au début de la Seconde Guerre mondiale, un groupe de matelots est entraîné par le destin. Description réaliste des petits faits du bord, amitié forgée par des années de camaraderie, impératifs d’une existence aventureuse qui laisse miroiter l’ancrage à terre comme la promesse d’un horizon inaccessible… La truculence du ton est constamment contrecarrée par la mélancolie, et l’atmosphère de la chronique, que sculptent les images travaillées de Gregg Toland, aussi généreuse que fataliste.

La Route au tabac
6.4

La Route au tabac (1941)

Tobacco Road

1 h 24 min. Sortie : 23 mars 1949 (France). Comédie dramatique

Film de John Ford

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Tournée dans la période résolument sociale et engagée de l’auteur, cette comédie grinçante, assez déséquilibrée, parfois franchement grotesque, laisse comme un goût de cynisme qui détonne dans l’œuvre fordienne. C’est qu’à voir pendant près d’une heure cette famille de paysans nécessiteux s’écharper en une escalade d’imbécilité et d’égoïsme (mention au fils débile et hystéro qui ne pense qu’à sa rutilante voiture), on se croirait chez des cousins américains des affreux, sales et méchants d’Ettore Scola. Mais au fur et à mesure que le récit progresse, la mélancolie vient recouvrir cette impression, l’espoir de lendemains qui chantent remplace la mélasse du quotidien, et le projet du cinéaste (recourir à la truculence outrancière pour conjurer le malheur et l’atrocité de la misère) finit par prendre forme.

Qu'elle était verte ma vallée
8

Qu'elle était verte ma vallée (1941)

How Green Was My Valley

1 h 58 min. Sortie : 25 juillet 1946 (France). Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

1890, dans une vallée du pays de Galles. Chez les Morgan, on est mineur de père en fils. Bien qu’arrivé tardivement sur le projet, le cinéaste s’est pleinement approprié cette chronique sociale qui illumine la condition tragique des gens modestes d’une humanité simple et universelle : espoirs et efforts sans calcul de parents aimants, loyauté et affection de leurs enfants, altruisme profond d’un pasteur touché par l’amour. Sacrifiés du capitalisme, attachés à une terre qui pourtant les noircit et les dévore, les personnages formalisent ici l’éternelle aspiration des êtres à des lendemains plus heureux : Ford en célèbre les valeurs avec peut-être un soupçon de paternalisme sentimental mais surtout beaucoup de générosité et une compréhension jamais entomologiste qui ne peut émaner que d’un fils de la classe ouvrière.

Les Sacrifiés
7

Les Sacrifiés (1945)

They Were Expendable

2 h 15 min. Sortie : 20 avril 1949 (France). Drame, Guerre

Film de John Ford

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Le conflit n’est pas terminé lorsque Ford tourne cette œuvre magnifique, ponctuée d’étonnantes séquences de batailles maritimes, et chargée de la douleur authentique des combattants au lendemain de Pearl Harbour. Le cinéaste célèbre à nouveau la force de la communauté, refuse l’individualisme pour exalter l’entraide et la solidarité. De là naît une émotion feutrée et intense, dans un repas partagé entre des officiers et une infirmière, dans la naissance pudique d’une idylle, dans la tristesse désemparée qui traverse la déroute américaine du Pacifique. C’est l’image de ces soldats errants, ou de Sandy (Donna Reed et ses faux airs d’Ingrid Bergman), les sacrifiés, livrés à eux-mêmes sur les plages de Manille conquises par l’ennemi. L’un des plus beaux films de guerre jamais réalisés.
Top 10 Année 1945 :
https://urlz.fr/keg0

La Poursuite infernale
7.8

La Poursuite infernale (1946)

My Darling Clementine

1 h 37 min. Sortie : 30 avril 1947 (France). Biopic, Drame, Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Nouveau fleuron du western archétypal : la perfection du classicisme selon son réalisateur, servie par l’élégance proverbiale d’Henry Fonda et la sombre détresse de Victor Mature. Le film est moins l’histoire d’une vengeance que le portrait de deux hommes face à leur destin, prêts à franchir une frontière. Il suffit à Ford de filmer une petite communauté dansant devant une église en construction pour évoquer toute la genèse d’une nation en devenir, sous l’égide commune du savoir (Doc Holliday) et du pouvoir (Wyatt Earp). Aventuriers, entraîneuses et Indiens font revivre cet Ouest américain mythique, où l’héroïsme, loin de toute apologie lénifiante, est en accord avec la communauté, et où la légende, enracinée dans le quotidien, se teinte de l’humour et de la générosité qui sont celles de l’auteur.
Top 10 Année 1946 :
https://urlz.fr/keg8

Le Massacre de Fort Apache
7.5

Le Massacre de Fort Apache (1948)

Fort Apache

2 h 08 min. Sortie : 4 août 1948 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Premier film consacré par le réalisateur à la cavalerie américaine, c’est aussi une étape marquante vers la réhabilitation des Indiens et vers l’honnêteté et le recul critique opéré par le cinéma quant à l’histoire encore récente de la guerre de Sécession. En confrontant le capitaine de terrain pacificateur aux idées antimilitaristes et le colonel imbu de sa science livresque et mû par l’ambition personnelle (Henry Fonda démarque de façon à peine voilée la figure de Custer), Ford oppose deux conceptions de l’autorité (l’une humaniste, l’autre rigoriste et puritaine) en une évocation minutieuse, sensible et chaleureuse du quotidien des Tuniques bleues. Malgré quelques conventions, cette vigoureuse critique de la discipline aveugle et de l’idéologie guerrière demeure un beau western classique.

Le Fils du désert
7

Le Fils du désert (1948)

3 Godfathers

1 h 46 min. Sortie : 17 novembre 1950 (France). Western, Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Belles comme dans les albums d’enfance, les couleurs du cinéaste se nourrissent ici du ciel turquoise, des dunes blanches du désert, des arabesques cinétiques de la tempête. Robert, William et Peter (ou plutôt Gaspard, Balthazar et Melchior) recueillent l’enfant de l’Étoile du Berger, se démènent avec les premières langes, le premier biberon, s’y dévouent jusqu’à la grandeur du sacrifice. L’optimisme enchanté de cette parabole biblique nous emporte, lorsque le père d’adoption montre le nourrisson à l’assemblée émerveillée du saloon de la Nouvelle Jerusalem, le soir de Noël, et que le pianiste entame "Silent Night", ou lorsque toute la communauté chante son adieu final à cet ancien brigand transfiguré, qui a confié le bébé à son ami le shérif. Comment ne pas chavirer devant tant de générosité, d’humanité, de transparence ?
Top 10 Année 1948 :
https://urlz.fr/kege

La Charge héroïque
7.1

La Charge héroïque (1949)

She Wore a Yellow Ribbon

1 h 43 min. Sortie : 29 septembre 1950 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Moustachu et vieilli, John Wayne est l’officier respecté d’une garnison en avant-poste, patrouillant dans Monument Valley au lendemain de la défaite de Custer. A quelques jours de la retraite, il se recueille sur la tombe de son épouse, tente de calmer les rivalités amoureuses de ses impétueux sergents, et mène une ultime mission qui vire au fiasco. John Ford semble prendre le rythme ralenti de son âge, laisse filtrer les sentiments sans les épancher, offre toute son attention à la vie concrète de ses personnages. Dorée par la poussière des paysages traversés, l’aventure fait la part belle à la nuance et à la respiration, développe une éthique de la sérénité en accord avec le temps passé, les expériences vécues et assumées, l’importance des relations au sein du groupe. Encore un très beau film.
Top 10 Année 1949 :
https://urlz.fr/kegg

Le Convoi des braves
7.1

Le Convoi des braves (1950)

Wagon Master

1 h 26 min. Sortie : 27 mai 1964 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Un convoi mormon, dirigé par un ombrageux pasteur, engage deux vendeurs de chevaux pour les guider vers l’Ouest : John Ford actualise le vieux thème du groupe en marche vers la Terre promise, en l’ancrant dans une réalité quotidienne qui insuffle plus de vérité et de souffle encore à sa dimension mythique – soixante ans plus tard, Kelly Reichardt en fera un quasi-remake minimaliste avec "La Dernière Piste". Une nouvelle fois, c’est la valeur des rites familiaux, de la solidarité et de la générosité désintéressée qui intéresse l’artiste : on danse des quadrilles endiablées dans la nuit du désert, on recueille des saltimbanques perdus, on chante l’espérance au coin du feu de camp. Le tout filmé avec ce sens de l’épure, cette nonchalance tranquille qui sont l’apanage des maîtres imposant leur talent sans le forcer.

Rio Grande
6.9

Rio Grande (1950)

1 h 45 min. Sortie : 17 août 1951 (France). Western, Romance

Film de John Ford

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Vie quotidienne dans un fort isolé, chansons qui exaltent l’esprit de corps, nostalgie de baroudeur… Les ingrédients du dernier film de la trilogie entamée avec "Fort Apache" et poursuivie avec "La Charge Héroïque" sont connus. L’occasion pour Ford de livrer un hommage curieusement rétrograde à la cavalerie, et de perpétuer certains antagonismes passéistes (gloire de l’armée américaine contre sauvagerie des Apaches, à l’heure où le genre connaît une évolution idéologique sur la question). Reste la belle facture d’une œuvre certes moins harmonieuse que les grandes réussites westerniennes de l’auteur, mais équilibrant l’action, l’aventure et la psychologie (les éternelles contradictions du devoir et du sentiment, de la filiation et de la reconnaissance) avec suffisamment de métier pour assurer le plaisir.

L'Homme tranquille
7.4

L'Homme tranquille (1952)

The Quiet Man

2 h 09 min. Sortie : 7 novembre 1952 (France). Comédie dramatique, Romance

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Le cinéaste a un jour décrit ce film comme sa première love story. S’éloignant comme il le fait régulièrement de l’univers du western, il consacre ici son attention et sa sensibilité, en une peinture pleine de tonicité, de truculence et de chaleur humaine, à son Irlande d’origine et à sa campagne verdoyante. Pittoresque, haute en couleur, fertile sans doute en projections idéalisées, la chronique s’habille d’une bienveillance tempérée d’humour et d’ironie, s’attache aux gens et aux paysages, se demande comment devenir propriétaire d’un terrain, membre d’une collectivité, citoyen d’une nation, et approfondit la problématique de l’individu et de son rapport au groupe : l’intégration ou au contraire le rejet, la solidarité, les relations complexes au sein d’une communauté, les us et coutumes qu’elle perpétue.

Le soleil brille pour tout le monde
7.5

Le soleil brille pour tout le monde (1953)

The Sun Shines Bright

1 h 30 min. Sortie : 8 mai 1953 (France). Comédie dramatique

Film de John Ford

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Le cinéaste a réalisé de ces films intimes et radieux bâtis comme des maisons : voici le plus beau de tous. Derrière la quiétude d’un monde paternaliste se profilent l’hypocrisie morale et l’injustice raciale, les fragilités d’une nation fracturée, disposée au lynchage, où se poursuit la guerre civile et se cachent des secrets honteux. Mais la sagesse d’un homme intègre peut transcender le factionnalisme darwinien, favoriser la prise de conscience collective et nourrir l’espoir d’une société meilleure. Sublime utopie, qui s’exprime autant dans la cocasserie du tableau (la course à l’élection, les cercles communautaires, les mœurs de la petite ville) que dans la grandeur d’une réhabilitation posthume. Gorgé de rires et de larmes, cet hymne pittoresque et bouleversant à l’idéal démocratique est rien moins que le chef-d’œuvre caché de John Ford.
Top 10 Année 1953 :
http://lc.cx/ZUzc

Mogambo
6.6

Mogambo (1953)

1 h 51 min. Sortie : 24 septembre 1954 (France). Aventure, Romance

Film de John Ford

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Il est certains films que l’on connaît par cœur avant même de les avoir vus, et dont on est en mesure d’énoncer le déroulement un quart d’heure à l’avance. L’aventurier grisonnant et la citadine secrètement blessée, d’abord hostiles, s’embrasseront au bout de la première bobine – on coche. Le cœur de la blonde ingénue fondera pour le baroudeur avant de revenir à son fade mais légitime époux – on coche. Chaque ébauche de tension dramatique, chaque esquisse de dilemme amoureux alimente ce qu’il est impossible de ne pas considérer comme une enfilade de clichés exotiques pour lecteurs du Reader’s Digest rêvant d’Afrique équatoriale. Clark Gable, Ava Gardner et Grace Kelly s’ébrouent comme ils peuvent dans les images argentées de ce roman-photo, si passé de mode qu’il en est sympathique.

La Prisonnière du désert
7.6

La Prisonnière du désert (1956)

The Searchers

1 h 59 min. Sortie : 8 août 1956 (France). Western, Aventure, Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Première synthèse de la filmographie fordienne. Dans le décor grandiose de Monument Valley, l’enracinement familial et féminin constitue l’aspiration impossible de personnages qui sont autant de chevaliers errants et vaincus. Edwards et son ennemi mortel, le chef Scar, tous deux rescapés de causes perdues et défaits par la cavalerie yankee, y forment les deux faces d’une même pièce – obsession commune de venger leurs morts, sarcasmes cachant une identique blessure. John Wayne y incarne un héros antipathique, raciste, violent, tourmenté par son passé et aliéné par sa vision mythique (et donc trompeuse) de l’Ouest. Les paysages enneigés et désertiques qu’il traverse sont autant de figurations de ses états d’âme, au cœur d’une œuvre dont l’amertume désenchantée tranche radicalement avec l’âge d’or du western classique.
Top 10 Année 1956 :
http://lc.cx/Zwm2

L'aigle vole au soleil
7.1

L'aigle vole au soleil (1957)

The Wings of Eagles

1 h 50 min. Sortie : 11 octobre 1957 (France). Biopic, Drame, Guerre

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Le sujet pourrait faire redouter un couplet ronflant à la gloire de l’aéronavale américaine. Que nenni. Ford fuit les trompettes, choisit une expression dédramatisée, dilate les moments en creux qu’il emplit d’une chaleureuse tendresse. Les bagarres drolatiques entre frères ennemis de la marine et de l’armée de l’air, l’obstination de l’inénarrable Carson à faire remarcher le Duke paralysé (deux armes : le mantra "I’m gonna move that toe" et l’invraisemblable attirail alcoolisé planqué derrière la commode), la main posée par Maureen O’Hara sur la nuque de son époux, après que les années lui aient imprimé une mèche blanche dans les cheveux… tout illustre la solidité des liens affectifs, leur subsistance à l’épreuve des coups du destin. Film superbe et injustement méconnu.
Top 10 Année 1957 :
http://lc.cx/ZwmE

Le Sergent noir
7.5

Le Sergent noir (1960)

Sergeant Rutledge

1 h 51 min. Sortie : 26 octobre 1960 (France). Western, Policier, Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Emblématique de la dernière période de l’auteur, celle des synthèses thématiques et du dépouillement formel, le film se distingue également par un propos politique assez vigoureux et par une âpreté dans la narration des faits et le portrait psychologique qui mènera tout naturellement au conclusif "Frontière Chinoise". Le genre westernien est ici relégué au fond de quelques flashbacks qui se complètent et se résume à l’intimisme d’une pièce de chambre, l’intrigue jouant d’abord sur les claviers de l’énigme policière et du suspense de prétoire. Transportant les préjugés sudistes et les relents de racisme dans les récits de cavalerie, déplaçant l’iconographie de la menace sexuelle, d’ordinaire noire ou indienne, Ford livre une œuvre sèche, ferme, captivante, sans picaresque ni sentimentalisme.

Les Deux Cavaliers
7

Les Deux Cavaliers (1961)

Two Rode Together

1 h 49 min. Sortie : 6 octobre 1961 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Il est de notoriété publique que Ford ne portait pas ce western dans son cœur. Cela peut se comprendre tant il accumule les scories, les gags hasardeux, les fautes de goût dans la superposition brouillonne des registres convoqués. Reprenant les thèmes du déracinement, du racisme et de l’antagonisme culturel qu’il avait développés avec "La Prisonnière du Désert", le cinéaste confronte deux caractères opposés (dont James Stewart dans un rôle inhabituel de shérif cynique et opportuniste) mais ressentant une même amertume face à la violence et aux préjugés de leurs congénères. Si, en dépeignant le fossé qui existe entre deux formes de civilisation, le film s’inscrit logiquement dans le parcours idéologique de l’auteur, sa facture quelque peu approximative est loin d’en faire une pièce capitale.

L'Homme qui tua Liberty Valance
8

L'Homme qui tua Liberty Valance (1962)

The Man Who Shot Liberty Valance

2 h 03 min. Sortie : 3 octobre 1962 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

À la fois méditation nostalgique et récapitulation de l’œuvre de John Ford, dont la rigueur d’expression atteint ici l’épure, cette véritable démythification des légendes considérées comme plus véridiques que les faits souligne l’influence mensongère des médias et la propension de la mémoire collective à transformer le passé en vérités simplistes, et les personnages ordinaires en icônes rayonnantes. C’est une réflexion complexe sur l’intégrité, la responsabilité, l’héroïsme, la politique, l’émergence du quatrième pouvoir, la transformation irréversible de l’Ouest américain, l’opposition de la démocratie et de la violence, qui s’articule autour de trois personnages représentant trois positions morales : le règne de la force, l’établissement de la loi et la nécessité de la force pour imposer la loi. Magnifique et définitif.
Top 10 Année 1962 :
http://lc.cx/Bs6

Les Cheyennes
7.2

Les Cheyennes (1964)

Cheyenne Autumn

2 h 34 min. Sortie : 30 octobre 1964 (France). Western

Film de John Ford

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Au cœur de l’odyssée tragique de ces survivants échappés de leur réserve et en marche vers le Dakota, la culpabilité américaine dans le génocide indien. Ni l’attitude compatissante du capitaine, ni le choix de l’institutrice de partager leur détresse, ni le politicien attentif et respectueux ne peuvent rien changer. L’hommage rendu au peuple cheyenne est certes noble, et ses intentions inattaquables : c’est le contre-champ nécessaire d’une mouvance westernienne qui, pendant des années, n’a cessé de les trahir, et la traduction d’une mauvaise conscience prise en étau entre le devoir à accomplir et l’idéal lincolnien. Reste que cette sincérité ne m’a jamais emporté, anesthésiée par trop de longueurs et par une facture dont la neutralité vire parfois à la tiédeur. Long, mou, et pour tout dire assez ennuyeux.

Frontière chinoise
7.5

Frontière chinoise (1966)

7 Women

1 h 27 min. Sortie : 27 juillet 1966 (France). Drame

Film de John Ford

Thaddeus a mis 8/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Longtemps taxé de machisme, Ford choisit, pour son dernier film, d’adresser un ultime pied-de-nez à ses détracteurs. Il organise autour de huit femmes un huis-clos intense en forme de mélodrame ambigu et flamboyant, qui met à nu les désirs et les frustrations au sein d’une mission et exalte la valeur de l’abnégation et du sacrifice. S’il reprend son motif favori et archétypal de la communauté assiégée, c’est pour mieux tordre le cou à l’hypocrisie et aux carcans réactionnaires d’une certaine société américaine, et célébrer le portrait d’une doctoresse moderne, athée, libérée, véritable trublion anticonformiste qu’Anne Bancroft, pantalon et cheveux courts, investit avec une fougue passionnée. La morale stoïcienne est d’une grande beauté et vient couronner une épitaphe aussi inattendue qu’accomplie.
Top 10 Année 1965 :
http://lc.cx/B2n

Thaddeus

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