Cover Woody Allen - Commentaires

Woody Allen - Commentaires

Que dire ? Woody Allen est un cinéaste d’une importance exceptionnelle pour moi, à l’origine de l’une des filmographies les plus admirables, riches et cohérentes qui soient. Il a composé une véritable comédie humaine, aussi merveilleusement drôle que profondément poétique et émouvante, et su allier ...

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42 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a 11 mois

Prends l'oseille et tire-toi !
7

Prends l'oseille et tire-toi ! (1969)

Take the Money and Run

1 h 25 min. Sortie : 21 juin 1972 (France). Comédie, Policier

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Le premier long-métrage du réalisateur emprunte déjà la forme du faux documentaire, ponctué d’images d’archives et de fausses interviews, qu’Allen réutilisera à plusieurs reprises au cours de sa carrière : principe parfaitement adapté pour raconter la vie dérisoire et pathologiquement ratée de Virgil Starkwell, voleur de son état, doué principalement pour échouer dans chaque projet de cambriole et élaborer des plans d’évasion plus ou moins foireux. Si le couple qu’il forme avec sa femme descend en droite ligne des films de Chaplin (le vagabond et la belle âme, pure et généreuse), c’est surtout aux Marx brothers et à leur sens de l’absurde que ce commentaire burlesque de la délinquance renvoie. Parfois amusant, l’ensemble incite à la clémence mais reste bien trop brouillon pour convaincre.

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe sans jamais oser le demander
6.5

Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le sexe sans jamais oser le demander (1972)

Everything You Always Wanted to Know about Sex but Were Afraid to Ask

1 h 28 min. Sortie : 6 août 1972 (France). Comédie, Sketches

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Odyssée de la sexualité (plus ou moins) ordinaire en sept tableaux, parmi lesquels la folle passion d’un médecin pour une brebis, le goût soudain d’un père de famille pour le travestissement, les ravages d’un sein géant en rase campagne et la nomenclature de l’appareillage cyclopéen que nécessite une érection. Le cinéaste assemble ses histoires en fonction de références directes, soit aux films intellectuels italiens (le sketch de la femme frigide renvoie au Petri d’avant la névrose politique), soit aux polissonneries sous-"Decameron" (le premier segment) ou aux soap-feuilletons à expériences et savants fous (Frankenstein-Carradine). Et il garde le meilleur pour la fin, avec un ancêtre génial d’"Il était une fois la vie" dont les trouvailles démentielles et les gags hilarants rachètent bien des faiblesses qui le précèdent.

Woody et les Robots
6.5

Woody et les Robots (1973)

Sleeper

1 h 29 min. Sortie : 1 mai 1974 (France). Comédie, Science-fiction

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Cryogénisé à la suite d’une mésaventure médicale, notre héros, servi par son physique de pierrot piteux, se réveille en 2173 au cœur d’une société orwellienne. Pour Allen l’anticipation n’est que prétexte à tester sa maladresse ironique face à l’excentricité charmante de Diane Keaton, se livrer à des pantomimes inspirées, rendre absurde le familier en le multipliant, aligner gags et dispositifs ubuesques à la Marx brothers : combat acharné contre un pudding proliférant qui devient raz-de-marée, découverte de l’Orgasmaton, imitation délirante et inversée du couple Brando/Leigh chez Kazan, ferme de fruits expérimentaux aux proportions cyclopéennes, reconstruction génétique d’un dictateur à partir de… son nez. Il y a de quoi rire, même si l’ensemble paraît décousu et dilettante en regard de l’œuvre à venir.

Guerre et Amour
7.2

Guerre et Amour (1975)

Love and Death

1 h 25 min. Sortie : 10 septembre 1975 (France). Comédie, Guerre

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Doté d'un budget conséquent et d'une excellente équipe technique, Allen affirme une plastique dominée, une impeccable direction d'acteurs, un niveau supérieur du scénario. Sa relecture de Tolstoï, pas si éloignée des Monty Pythons, l'impose maître de son langage et de ses ambitions, et laisse filtrer des soucis intellectuels qui anticipent sur ses grands films autobiographiques : il va ainsi jusqu’à truffer ses calembours de métaphysique et d’absurde sartrien. Ni solennité ni sérieux pour autant : les clins d'œil à Bergman (de la Faucheuse – blanche – tout droit sortie du "Septième Sceau" au jeu de profils féminins à la "Persona"), les monologues sur la finalité de l'existence et la peur de la mort, les références culturelles ne freinent pas mais nourrissent l'esprit iconoclaste d'un hilarant festival comique.
Top 10 Année 1975 :
http://lc.cx/AU9

Annie Hall
7.4

Annie Hall (1977)

1 h 33 min. Sortie : 7 septembre 1977 (France). Romance, Comédie dramatique

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Voir Woody faire surgir le philosophe Marshall McLuhan dans une file d’attente d’un ciné new-yorkais pour remettre à sa place à un intello snobinard donne une petite idée de la jubilation que procure la vision de ce journal intime à l’anarchisme narratif proliférant. Car des idées de ce genre, il y a quasiment dans chaque scène, organisées par la grâce d’une forme éblouissante et iconoclaste qui mêle sketchs, monologues intérieurs, interviews, entretiens analytiques, animation... Ouvrant la chronique d’un écrivain de Manhattan, récapitulant sa liaison adulte et cathartique avec Diane Keaton, l’auteur s’exprime sur tous les sujets (la religion, l’amour, le show-business, la culture...), et assume pleinement sa personnalité d’homme équilibré, capable de plaire aux femmes et de conduire une morale libératrice face aux ambiguïtés de son métier.
Top 10 Année 1977 :
http://lc.cx/AUt

Intérieurs
7

Intérieurs (1978)

Interiors

1 h 33 min. Sortie : 2 août 1978 (États-Unis). Drame

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Trois frangines face à la séparation de leurs parents, leurs époux respectifs, leurs secrets inavoués, leurs rancœurs enfouies, l’amour qu’elles se portent, parfois si difficile à communiquer… Ce n’est pas encore l’admirable "Hannah et ses Sœurs", mais c’est déjà une réussite achevée, où l’éclatement et la solitude tendent à révéler la crise d’un groupe uni par une affection instinctive et miné par des antagonismes souterrains. Avec une remarquable économie de moyens, l’auteur cisèle une étude psychologique faite de pénombre, de rigueur et de gravité. La fermeté elliptique et distante de la mise en scène n’empêche nullement l’émotion de fleurir, car loin du drame guindé trop respectueux de son maître (suédois), c’est une œuvre habitée, sincère, pas loin d’être bouleversante sur la fin.
Top 10 Année 1978 :
http://lc.cx/Awk

Manhattan
7.5

Manhattan (1979)

1 h 36 min. Sortie : 5 décembre 1979 (France). Comédie, Drame, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Suite dans la continuité d’"Annie Hall", avec en sus une plus-value esthétique qui fait du réalisateur un véritable poète (que ceux qui ont vu la visite au planétarium, où les silhouettes des protagonistes se confondent avec un ciel constellé d’étoiles, osent dire le contraire). La gerbe d’images montées sur les rythmes euphorisants de Gershwin, l’inclination pour les aphorismes délicieux, le goût de l’introspection, l’humour ravageur qui atténue une angoisse portée par instants sur une réelle acrimonie, la tendresse et la nostalgie qui prédisposent de l’aptitude au bonheur, la drôlerie dévastatrice de la chronique qui impose Allen en génial annaliste de son temps... Tout cela est nourri au ton doux-amer, à la satire au vitriol, à la réplique étincelante, à l'intelligence spirituelle et malicieuse, et c’est plus qu’un bonheur magique, c’est une œuvre-phare.
Top 10 Année 1979 :
http://lc.cx/AwU

Stardust Memories
7.1

Stardust Memories (1980)

1 h 29 min. Sortie : 5 décembre 1980 (France). Comédie dramatique

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Décalquant explicitement celle de "8 ½" (l’attente ferroviaire se substituant à l’embouteillage routier), l’introduction annonce la couleur : Woody s’offre une auto-analyse en forme de bilan fellinien. Allen-Guido ne cherche pas à masquer la filiation et se coule dans la ronde des femmes et des fans, des angoisses et des interrogations créatrices, en s’y dévoilant comme peut-être jamais auparavant. Sandy est son double grimaçant et amer, un artiste qui ne sait pas vraiment aimer, un comique qui découvre les limites de l’humour dans une vie moyennement engagée et prétend percer à jour les raisons profondes de son art, ses limites morales, sa fonction thérapeutique et son niveau libérateur. Très joli film, tendre et attristé, souriant et nostalgique à la fois, mousseux et nourrissant comme une pâtisserie.

Comédie érotique d'une nuit d'été
6.9

Comédie érotique d'une nuit d'été (1982)

A Midsummer Night's Sex Comedy

1 h 28 min. Sortie : 13 octobre 1982 (France). Comédie, Fantastique, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Réunion à la campagne, en cette année 1905. Un Merlin bricoleur, marié à une dame inexplicablement frustrée, reçoit son meilleur ami coureur de jupons avec sa dernière conquête, un savant pédant et la fiancée de ce dernier. Entre passions fugaces et douleurs secrètes, Cupidon en pleine folie se met à tirer ses flèches au hasard et le désordre envahit les esprits, les corps, voire les cœurs. C’est un ballet amoureux, un film gai et léger, un badinage qui part de chez Tchekhov pour arriver chez Marivaux. Plaçant sa confiance dans l’harmonie universelle et panthéiste de la nature, Allen replace son univers parmi les vents coulis de ces étés luxuriants où la magie hante de nuit les frondaisons. Mais le ton est moins mordant, la réflexion moins profonde, le dialogue moins vif qu’à l’accoutumée.

Zelig
7.4

Zelig (1983)

1 h 19 min. Sortie : 14 septembre 1983 (France). Comédie, Fantastique

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

D’une verve comique toujours aussi féconde, Allen élabore un faux-docu qui accommode la rigueur et l’ironie des fausses images d’archive au "plat esthétique" de l’image, et les intègrent dans une réflexion plus globale sur le cinéma. Au-delà de la drôlerie irrésistible de l’objet, véritable patchwork identitaire prouvant que la marqueterie est aussi une forme d’art, c’est la continuation de l’auto-examen allenien, un modèle de distanciation critique, un formidable questionnement sur la frontière entre folie et normalité, la transmutation de la réalité en légende ou le besoin qu’à la foule de se fabriquer des héros. L’exploitation d’un canevas digne d’un canular pirandellien mêle l’ubiquité à la satire et la psychanalyse à l’amour triomphant, présenté comme le seul remède à l’angoisse de vivre. Bref c’est génial.
Top 10 Année 1983 :
http://lc.cx/UyN

Broadway Danny Rose
6.9

Broadway Danny Rose (1984)

1 h 24 min. Sortie : 3 octobre 1984 (France). Comédie

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

J’ai été moins séduit par celui-ci. En se remémorant ses propres débuts laborieux, Allen revient à veine comique plus classique, s’octroie une pause rieuse, nostalgique et amicale, loin du comique savant des précédents opus. Autour d’un cachetonneur de cabarets que ses poulains abandonnent sans remords à la moindre ruade de succès, il organise un petit vaudeville mâtiné de parodie de film de gangsters, avec sa galerie de caricatures égratignées, son chanteur rital et replet, ses mafiosi agités et lents du bulbe... Tout ce petit monde s’agite beaucoup, rien ne finit mal, tout ne finit pas bien. Mia Farrow est drôle en idiote à la voix haut perchée, la toile de fond offre l’occasion d’un jeu plaisant avec les stéréotypes du genre, et certaines situations sont savoureuses, mais le film est franchement mineur.

La Rose pourpre du Caire
7.4

La Rose pourpre du Caire (1985)

The Purple Rose of Cairo

1 h 22 min. Sortie : 29 mai 1985 (France). Comédie, Fantastique, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

On est ici dans la veine la plus féérique et surréaliste de l’auteur, mais où le merveilleux est constamment cerclé (et même motivé) par une triste réalité, par l’impossibilité d’échapper à sa vie autrement que par le biais de l’imaginaire. De cette histoire de fascination éperdue pour l’univers doré et excitant de films d’époque, Allen tire la matière d’un superbe hommage au septième art et d’une réflexion profondément mélancolique sur l’enfermement du réel, et invite à remonter le temps pour retrouver les charmes perdus et la magie à la fois libératrice et douloureuse du rêve et du spectacle : illusion, réalité trompe-l’œil, jeux de miroirs. Ce faisant, il distille l’un de ces bonheurs légers et fugaces qui forment le sel du cinéma et de la vie. Lucide et poétique, grave et émouvante, la réussite est admirable.
Top 10 Année 1985 :
http://lc.cx/UVt

Hannah et ses sœurs
7.3

Hannah et ses sœurs (1986)

Hannah and Her Sisters

1 h 47 min. Sortie : 21 mai 1986 (France). Comédie dramatique

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Revenant à la chronique mais sur un mode moins angoissé, plus apaisé et mélancolique, Allen signe l’un de ses très grands sommets polyphoniques, dont la structure romanesque élaborée et la densité du matériau narratif offre un aperçu éblouissant de son aisance à jongler avec les récits, les personnages, les régimes (grave, comique, introspectif, chaleureux, mélancolique). Comme souvent, il se réserve un rôle hilarant de comique hypocondriaque et offre à ses acteurs des rôles particulièrement étoffés qui respirent le parfum des choses vécues et sereinement remémorées. Vif, tendre, mordant, c’est un magnifique film tchékhovien autour de la famille, de la fidélité, de la fragilité humaine, des solidarités intimes et des rivalités secrètes, qui agence une ronde de coups de foudre et de retournements en phase avec la beauté automnale de New York.
Top 10 Année 1986 :
http://lc.cx/UVF

Radio Days
7

Radio Days (1987)

1 h 28 min. Sortie : 20 mai 1987 (France). Comédie

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Le temps d’une parenthèse légère, assortie des couleurs chaudes de souvenirs tendrement évoqués, le cinéaste revient en enfance. Tentant de rendre palpable la notion du temps évaporé et de ses irisations, il donne vie à des petites vignettes qui donnent l’impression de feuilleter un album de photos jaunies ou d’écouter un vieux 78 tours oublié. Cette évocation de sa jeunesse brode autour des univers parallèles de sa famille et de la radio une savante mosaïque d’événements et de personnages (plusieurs dizaines, parfois juste esquissés), s’autorisant des échappées mélancoliques sur la trace indélébile du passage de nos vies (le réveillon final). Elle distille un charme diffus, fait sourire et berce par la chaleur de sa tonalité, mais demeure une étape mineure dans le parcours de l’auteur.

September
6.4

September (1987)

1 h 22 min. Sortie : 9 mars 1988 (France). Drame

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

"Intérieurs", neuf ans après. Comme pour son premier film grave, Allen met le sourire hors jeu : enfermés dans le huis-clos d’une maison de campagne, chacun ou presque de ses six personnages aime sans retour et se dérobe devant le/la prétendant(e). C’est la fin des vacances et, l’automne arrivant, on parle de vendre la bâtisse, de rentrer chez son mari, de finir le grand roman inachevé. Il n’y pas de temps mort, que des vies en creux, des larmes amères, des éclairages aux bougies et des volets fermés sur les chagrins des femmes et les regrets des hommes. L’écriture est si verrouillée, les murmures si affectés, la scénographie si uniformément rigoureuse que le film flirte parfois davantage avec le calcul qu’avec la sensibilité. Mais sa lucidité plaintive l’emporte largement aux points : Art Tatum a le dernier mot.

Une autre femme
7

Une autre femme (1988)

Another Woman

1 h 21 min. Sortie : 1 mars 1989 (France). Drame

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

De tous les films de l’auteur, c’est l’un de ceux qui accusent le plus ouvertement l’héritage bergmanien (c’est d’ailleurs sa première collaboration avec Sven Nykvist). Allen fait une à nouveau fructifier son inspiration introspective et compose l’un des ses plus beaux portraits de femme, auquel Gena Rowlands prête sa fragilité tourmentée. Subtilement construit, osant des glissements oniriques inédits pour son auteur, le film prend à revers le réalisme psychologique des grandes réussites précédentes et capte les pulsations d’un théâtre intérieur qui tient davantage de la psychanalyse, de l’auto-investigation, de la mise à nu du refoulé et des blessures intimes. Il agit comme un superbe tour d’adresse bovaryste, un jeu d’échos qui s’accomplit avec le maximum de discrétion et une sensibilité d’une totale élégance.
Top 10 Année 1988 :
http://lc.cx/UVC

New York Stories
6.1

New York Stories (1989)

2 h 04 min. Sortie : 17 mai 1989 (France). Comédie, Drame, Romance

Film de Woody Allen, Francis Ford Coppola et Martin Scorsese

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

"Le complot d’Œdipe"
Allen en artiste escamoteur, magicien victime de son pouvoir d’illusion, celui qui rate tous ses tours mais qui fait de son incapacité apparente la matière même de son talent. Dans cette revue des mythologies personnelles que constitue le triptyque, son sketch est bien évidemment le plus individualiste, le plus narcissique – c’est aussi le meilleur, sans doute parce que sa logique est en parfaite adéquation avec sa durée. Un cauchemar psychanalytique des plus drôles et réjouissants, qui voit une mère possessive et castratrice disparaître au cours d’un numéro style malle des Indes avant de ressurgir dans le ciel de Big Apple, immense tête prenant les habitants à témoin pour mieux accabler notre pauvre héros. Retour du refoulé : la mère comme un œil qui voit tout et sait tout. Quarante minutes de bonheur.

Crimes et Délits
7.3

Crimes et Délits (1989)

Crimes and Misdemeanors

1 h 44 min. Sortie : 21 février 1990 (France). Comédie dramatique

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Le cinéaste se fait métaphysicien, confrontant ses principes et sa culture juifs aux grandes questions existentialistes. Ici, un intellectuel admiré pour son exaltation de la vie finit par se suicider, un homme hanté par son crime s'interroge, comme chez Dostoïevski, sur la nature de la culpabilité et l'idée d'une Justice universelle, un autre s'aveugle, tel Isaac par Jacob, d'un refus du compromis qui le fait passer à côté de l'amour. Si le ton est souvent à l'humour noir, à l'ironie cinglante, égratignant les infidèles, les lâches, les arrogants, les intellectuels faussement incompris, l'œuvre, construite avec une rigueur implacable, dévoile une amertume, un malaise, une tristesse qui n'ont d'égale que sa lucidité. C'est une admirable comédie humaine qui brasse déterminisme, poids de la morale et responsabilité individuelle, choix et destin, crime et châtiment... Probablement le chef-d'œuvre d'Allen.
Top 10 Année 1989 :
http://lc.cx/UVV

Alice
6.9

Alice (1990)

1 h 42 min. Sortie : 6 février 1991 (France). Comédie, Fantastique, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Sur un mode plus léger et plus fantaisiste, le film reprend les leitmotivs alleniens : allers-retours avec le passé, confrontations intérieures, jumelage de fiction et de réalité, sous le patronage assez euphorisant d’un véritable éloge du surnaturel et de la magie, de ses possibilités miraculeuses et de ses libérations désinhibantes. Le réalisateur fait ici le récit d’une métamorphose, d’une prise de conscience, de la lutte d’une femme contre son milieu pour changer sa vie et devenir une autre. La réussite est mineure en regard des grands opus de l’artiste, mais ce qui est mineur chez lui demeure on ne peut plus savoureux : péripéties extravagantes, aventures cocasses et changements de ton composent une fable radieuse, qui dispense comme toujours, sans effet ni chichis, un sens et une morale.

Ombres et Brouillard
6.9

Ombres et Brouillard (1991)

Shadows and Fog

1 h 25 min. Sortie : 12 février 1992 (France). Comédie, Policier, Drame

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Une pincée de "Nosferatu", une ville étouffante où rôdent des milices et un tueur à la "M le Maudit", un cirque sorti de "La Nuit des Forains", un expressionnisme accentué et trempé dans le burlesque des origines… Les références croulent mais on est bien chez notre auteur binoclard. Car il est ici un petit bureaucrate portant toute la culpabilité originelle du peuple juif, se demandant quel rôle il est censé jouer dans le "plan", fuyant comme Joseph K. dans une nuit de plus en plus absurde, se voyant demander par trois fois s’il croit en Dieu, s’offrant finalement une sortie à la faveur du jeu et de l’artifice, humbles stratégies que l’homme se donne pour enchaîner le mal juste un instant afin de s’en souvenir, pour affronter le réel sans en mourir. En somme il s’agit d’un Woody moyen, c’est-à-dire d’un très bon film.

Maris et Femmes
7.1

Maris et Femmes (1992)

Husbands and Wives

1 h 48 min. Sortie : 2 décembre 1992 (France). Comédie, Drame, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Un autre sommet, et une œuvre de synthèse (quinze ans de questionnement artistique s'y condensent) autant que de rupture. Fragmentée, instable, privilégiant le plan-séquence fébrile, la caméra n'a peut-être jamais été aussi libre, aussi proche des personnages. Avec l'acuité et la cruelle lucidité d'un Cassavetes ou d'un Bergman, dont il redécline en quelques sorte les "Scènes de la vie conjugale", Allen s'en prend à la lâcheté et l'hypocrisie des rapports amoureux, ausculte le mariage au péril de l'âge et de l'égoïsme, dresse son bilan conjugal sous forme de journal intime, poignant d'impudeur et de vérité. L'analyse est à la fois mordante et douloureuse, magnifiée par deux couples d'acteurs exprimant doutes et mensonges, sincérité et mauvaise foi, déraison et fragilité, secrets et amertumes. Dernier film avec Mia Farrow, une page se tourne.
Top 10 Année 1992 :
http://lc.cx/UPx

Meurtre mystérieux à Manhattan
7.3

Meurtre mystérieux à Manhattan (1993)

Manhattan Murder Mystery

1 h 44 min. Sortie : 13 octobre 1993 (France). Comédie, Policier, Thriller

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Allen est coutumier du rebond et du contre-pied : le dernier film était noir et anxieux, celui-ci est l’une de ses comédies les plus irrésistibles. Voir la dégaine chétive de Woody suivre à contrecœur, comme un toutou angoissé, une Diane Keaton-détective, aussi intrépide que lui est couard et peureux, donne une petite idée du plaisir procuré. Le rythme est trépidant, les répliques étincelantes fusent à la vitesse de l’éclair, l’humour est dévastateur (le message reconstruit mais misérablement foiré dans la cabine : à pisser de rire), les clins d’œil au policier hollywoodien alimentent une intrigue tenue avec un formidable sens du suspense, et qui dessine une morale tendre et heureuse : un couple se raffermit dans l’aventure, la crise est résolue par le film qu’il se joue. Dans tous les registres, ce type fait de l’or.
Top 10 Année 1993 :
http://lc.cx/UPf

Coups de feu sur Broadway
7

Coups de feu sur Broadway (1994)

Bullets over Broadway

1 h 38 min. Sortie : 13 janvier 1995 (France). Comédie, Gangster, Drame

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Légèrement moins mordante et euphorisante mais toujours savoureuse, la comédie est au menu de ce mélange de pochade broadwayenne et de pastiche de film de gangsters, où un petit génie du théâtre new-yorkais se faire prendre en main par un caïd qui se découvre des sensibilités de dramaturge insoupçonnées. Allen réinvente une exquise atmosphère rétro, charge le divertissement d’une réflexion grave et parfois amère sur la créativité et l’intégrité artistique. Car sous la gaze de la bonne humeur, il est comme toujours probable comme qu’il n’ait pas le moral, dissimilant à nouveau ses ennuis sous sa quête de la chimère toute américaine de l’entertainment. Que cela serve de le leçon : les films du professeur Allen sont un grand remède préventif contre la folie des grandeurs intellectuelles.

Maudite Aphrodite
6.6

Maudite Aphrodite (1995)

Mighty Aphrodite

1 h 35 min. Sortie : 14 février 1996 (France). Comédie, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Entre New York et le temple de Taormine, l’esprit souffle, les imbroglios amoureux s’entremêlent, les destins se dénouent. Les dieux ne jouent pas à cache-cache, ils interviennent à tout moment déguisés en chœur antique, ils pensent, critiquent, participent et aident. Fil rouge d’un film que l’on peut qualifier de mineur, mais en précisant que Woody est comme les bons crus : ses petites années restent bien supérieures à tout ce que l’on peut trouver ailleurs. Chroniqueur du désarroi, il bouscule son ordinaire d’éléments disparates, grignote en gags oratoires ce qu’il gagne en polyphonie, et offre une malicieuse comédie sur l’incomplétude, la frustration, la paternité, les jeux du destin et du hasard, qui arbore de bien jolies couleurs. Quant à l’épatante Mira Sorvino, elle fait une adorable gourde.

Tout le monde dit I Love You
6.6

Tout le monde dit I Love You (1996)

Everyone Says I Love You

1 h 41 min. Sortie : 12 février 1997 (France). Comédie, Comédie musicale, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Ce sont les charmes de la comédie musicale féérique, dopée à la poudre de perlimpinpin, qu’Allen tente de réactiver ici. Entre Paris, Venise et New York, il organise une ronde de déconvenues et de retrouvailles amoureuses avec une légèreté de tous les instants : nulle angoisse existentielle, le film se situe dans un espace de rêve et d’artificialité lustrés où les chagrins se soignent au champagne le temps d’un réveillon au Ritz et où les couples entament un pas de deux en voltigeant sur les quais de la Seine. Mais il fait prendre à toute sa mythologie hollywoodienne le risque du concret et de la caricature, comme s’il voulait restituer cet héritage à notre vie de tous les jours afin de l’adoucir. Ce n’est pas forcément la veine de Woody qui me parle le plus, mais la grâce est souvent au rendez-vous.

Harry dans tous ses états
6.8

Harry dans tous ses états (1997)

Deconstructing Harry

1 h 36 min. Sortie : 21 janvier 1998 (France). Comédie, Drame, Fantastique

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Si le ton est toujours à la comédie, celle-ci est pour le coup très noire, macérant les éternelles peurs de l’auteur avec une liberté éblouissante, un sens de la répartie et de la dérision (désespérée) des plus incendiaires. La forme est hachée, décousue, calquée sur le débit saccadé et nerveux d’un homme qui se raconte par essoufflement, d’une pellicule qui défile comme une machine devenue folle. On y saute d’un régime narratif à un autre, au fil d’une chronologie déconstruite qui pratique constamment la rupture de ton, mêle réalité (vacillante), scènes de roman, virée en enfer. Farci d’idées géniales (le mec flou, jouissif), le film n’épargne rien à son auteur, qui s’affiche dans tout son narcissisme destructeur, ses névroses, ses phobies, ses lubies. Rarement autoportrait aura été aussi féroce, aussi angoissé.

Accords & Désaccords
6.7

Accords & Désaccords (1999)

Sweet and Lowdown

1 h 35 min. Sortie : 26 janvier 2000 (France). Comédie, Drame, Comédie musicale

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

En mode mineur, Allen paie son tribut au jazz à travers le portrait d’un guitariste imaginaire de l’entre-deux guerres. Curieusement, le film est l’un des moins musicaux de l’artiste, se contentant d’aligner les vignettes historiques, les faux témoignages, les anecdotes malicieuses en suivant une structure qui rappelle celle de "Zelig", l’originalité en moins. Dans un plaisant exercice de pédagogie virtuelle, il invente et impose l’existence d’un surdoué fantasque en fuite perpétuelle pour échapper aux créanciers, aux femmes, aux gangsters. Le ton enlevé de la chronique, la tendresse mêlée d’humour piquant avec laquelle le cinéaste dépeint les atermoiements artistiques de son héros, la jolie galerie de seconds rôles (Samantha Morton surtout) et le talent de Penn emportent le morceau.

Escrocs mais pas trop
6.5

Escrocs mais pas trop (2000)

Small Time Crooks

1 h 34 min. Sortie : 6 décembre 2000 (France). Comédie, Policier

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Le film s’ouvre comme un remake assez hilarant du "Pigeon" qui rappelle les premières heures de "Prends l’oseille et tire-toi !" : une bande de Pieds Nickelés de Manhattan fomente un casse de banque trop ambitieux pour elle et se surpasse en maladresse bouffonne. Au bout de trois quarts d’heure, le projet a bien sûr lamentablement échoué mais le hasard a transformé les gangsters à la mie de pain en milliardaires du biscuit, résolus (surtout l’héroïne, épatante Tracey Ullman) à percer dans le grand monde. La comédie se réoriente alors dans l’axe d’un modeste vaudeville égratignant le milieu de la culture et du snobisme et s’amusant gentiment de la façon dont l’argent change les gens. Certes tout cela ressemble un peu à un amuse-gueule entre deux grands crus, mais le divertissement demeure roboratif.

Hollywood Ending
6.5

Hollywood Ending (2002)

1 h 52 min. Sortie : 15 mai 2002 (France). Comédie, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 3/10.

Annotation :

Un opus passablement raté. Allen y verse dans la satire revancharde mais ultra-molle du microsome hollywoodien et de son absurdité aveugle, à travers une série de portraits caricaturaux et de situations un peu faciles qui épanchent une misanthropie et une amertume d’assez mauvais aloi. L’artiste se cogne aux meubles et aux diktats du système, tombe du haut des décors, brocarde sa propre propension à engager des chefs opérateurs asiatiques, mais tout cela patine bien vite et finit par tourner à vide. En bref je me suis beaucoup ennuyé à ce divertimento fort redondant et paresseux au possible dans son refus de faire varier d’un iota le plaisir du bon mot allenien, et dont l’autodérision lourde et l’épaisseur du trait sont à peine atténuées par une verve clownesque (légèrement) retrouvée.

Match Point
7.1

Match Point (2005)

2 h 04 min. Sortie : 26 octobre 2005 (France). Thriller, Drame, Romance

Film de Woody Allen

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

La résurrection, le coup de jeunesse magistral que je n’attendais plus de sa part. Galvanisé par la présence érotique de Scarlett Johansson et la cruauté feutrée de la haute société londonienne, qu’il scrute avec une acuité cinglante, le cinéaste retrouve la veine moraliste de "Crimes et Délits", analysant le parcours d’un jeune arriviste et auscultant les rapports serrés entre recherche d’élévation sociale, jeux du pouvoir et de la séduction, conflit des intérêts et des sentiments. D’un pessimisme noir qui n’égale que l’amoralité joyeuse avec laquelle il est conçu, le film agence un suspense au cordeau et peaufine un travail d’orfèvre, une mécanique implacable qui joue au chat à la souris avec le spectateur et ses attentes, des images à l’élégance vénéneuse et au service d’un propos ironique, grave, désenchanté, d’une terrible lucidité.
Top 10 Année 2005 :
http://lc.cx/UPn

Thaddeus

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