Cover Alain Resnais - Commentaires

Alain Resnais - Commentaires

L’un des plus importants cinéastes de la seconde moitié du siècle, un très grand inventeur de formes, un défricheur, un avant-gardiste, à l’origine de révolutions peut-être comparables à celles opérées par Welles ou Antonioni. Au cœur de la psyché humaine, mettant en jeu les questions du temps, de la ...

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24 films

créee il y a presque 12 ans · modifiée il y a 7 mois

Les Statues meurent aussi
7.6

Les Statues meurent aussi (1953)

30 min.

Documentaire de Ghislain Cloquet, Alain Resnais et Chris Marker

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Ni traité ethnographique ni visite guidée muséale, cet étonnant documentaire est d’abord un précis anticipé des œuvres à venir de Resnais et Marker. Les prises de vues jouent de la plasticité des objets d’art africain, le montage pratique des entrechocs fructueux, le texte poétique stimule l’imaginaire et affûte la réflexion. Dénonçant la modernisation du continent des origines et l’appauvrissement esthétique causé par la colonisation, les auteurs s’en prennent avec une ardeur offensive aux ravages causés à la culture nègre par l’islam et surtout l’Occident, et font comprendre à quel point la mondialisation et la domination blanche ont phagocyté un héritage millénaire à nul autre pareil. Soixante ans après, la beauté et la pertinence de ce plaidoyer pour le développement spirituel restent intacts.

Nuit et Brouillard
8

Nuit et Brouillard (1956)

32 min. Sortie : janvier 1956. Historique, Guerre

Documentaire de Alain Resnais

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Une œuvre fondamentale, tant dans son propos que dans la visualisation de son expression. Pour la première fois, dix ans après la découverte des camps d’extermination et de l’horreur de la Shoah, Alain Resnais formalise l’indicible en un bouleversant requiem qui immortalise l’un des chapitres les plus sinistres de l’histoire universelle et infuse le niveau le plus profond de la conscience. La litanie obsessionnelle d’images dont le caractère insoutenable ne doit rien à l’imagination, le commentaire dit d’une voix blanche par Michel Bouquet et fait d’interrogations sobres et retenues, la puissance évocatrice du montage renvoient à un questionnement crucial sur la responsabilité individuelle et collective, et partant sur un insondable mystère – pourquoi ? comment ? les causes d’un mal aussi absolu ont-elles été durablement extirpées ?
Top 10 Année 1956 :
http://lc.cx/Zwm2

Toute la mémoire du monde
7.6

Toute la mémoire du monde (1956)

22 min. Sortie : novembre 1956 (France).

Documentaire de Alain Resnais

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Un nouveau modèle d’analyse esthétique et de stimulation intellectuelle, une exploration des arcanes de la Bibliothèque Nationale, pleine de brio et de fantaisie, d’imprévu et de digressions borgésiennes. Le sujet pouvait donner matière à dix court-métrages, son ampleur faisait courir un danger constant de dispersion, mais le cinéaste en tire une passionnante immersion dans les archives de la connaissance humaine. Son habileté est d’en aborder tous les aspects sur un ton extrêmement simple, naturel, évident, de nous mener partout avec une souplesse extraordinaire, dans la grande salle de lecture filmée en tri X pellicule, entre les rayons labyrinthiques emplis de richesses incomparables, d’estampes séculaires, de manuscrits, de médailles et d’imprimés précieux. Vingt minutes de bonheur.

Le Chant du styrène
7.2

Le Chant du styrène (1958)

13 min. Sortie : 1958 (France).

Court-métrage documentaire de Alain Resnais

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Pour son dernier essai documentaire, le cinéaste recourt à la couleur, jouxte la malice du verbe et la fascination pour la matière, et retrace – à l’envers – le processus chimico-industriel qui transforme le composé organique en matériau plastique fini. Il promène sa caméra hypermobile le long des tuyauteries tentaculaires des usines à gaz, capte la danse d’une machinerie technologique complexe, s’amuse du jaillissement des formes et des teintes et exalte en esthète leur mystérieuse alchimie. Sous la conduite d’un guide éclairé et désinvolte nommé Raymond Queneau, l’exploration des usines Péchiney devient ainsi un poème au chromatisme de comédie musicale, une balade métamorphosée par les facéties chantantes des alexandrins, un éloge de la modernité inspiré de l’abstraction et du pop art.

Hiroshima mon amour
7.2

Hiroshima mon amour (1959)

1 h 30 min. Sortie : 10 juin 1959. Drame, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

À l’heure où la Nouvelle Vague sonne son départ, Resnais prend le contre-pied de la spontanéité vériste à travers une incantation extrêmement pensée qui, comme "Nuit et Brouillard", s’enracine dans la tragédie de l’histoire pour atteindre à l’intime le plus secret. Effets de montage alterné, obsédants travellings avant, fixation sur des objets et des lieux insolites : le texte psalmodié de Marguerite Duras verbalise les processus de la mémoire, les images mentales s’organisent en autant de rimes visuelles et musicales, de contrastes et de contraires dont la synthèse produit sens et émotion. Confrontant des espaces et des temps qui rappellent les deux côtés de la "Recherche" proustienne, cette magnifique histoire d’amour et d’oubli est comme du Antonioni avant l’heure, mis en scène par Eisenstein, avec une charge de sensibilité qui ne doit rien à personne.
Top 10 Année 1959 :
http://lc.cx/Zw95

L'Année dernière à Marienbad
7

L'Année dernière à Marienbad (1961)

1 h 34 min. Sortie : 29 septembre 1961. Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Resnais aurait pu arrêter la révolution ici mais il aime les challenges. Après Duras, il fait équipe avec Robbe-Grillet pour ce récital littéraire qui pousse encore plus loin la visualisation des mécanismes psychiques de la pensée, de l’imaginaire et du souvenir, comme s’il était en quête d’un secret profondément enfoui. Pulvérisé, le récit narratif abolit le temps et l’espace en une construction suprêmement élaborée et obéit à une logique faite de juxtapositions, de superpositions, d’associations d’idées qui mêlent le réel au fantasme, le passé au présent. La subjectivation radicale réunit réalités extérieure et intérieure en une suite de monologues et de variations contrapunctiques, une liturgie ensorcelante d’images et de mots qui fascine par l’abstraction de sa composition, ses envoûtants mouvements d’appareil, la perfection absolue de sa mise en forme.
Top 10 Année 1961 :
http://lc.cx/BMA

Muriel ou le temps d'un retour
6.7

Muriel ou le temps d'un retour (1963)

1 h 56 min. Sortie : 2 octobre 1963. Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 3/10.

Annotation :

Je n’ai curieusement pas accroché à celui-ci, pourtant moins radical que les précédents, et dont les ponts tangibles avec la réalité s’inscrivent dans un récit classique qui n’en possède pas moins ses allées cavalières, ses sentiers perdus. Resnais se penche avec une lucidité désenchantée sur la guerre perdue d’Algérie et mêle la dénonciation politique au portrait d’une femme désorientée par la violence de ses prises de conscience. Il fait heurter le prosaïsme du quotidien à une vision presque cubiste du monde contemporain, accentuée par un montage elliptique, qui rend le contraste particulièrement déroutant. Mais parce que tout spectateur un tant soit peu dialecticien devrait y trouver assez de simultanéités et de folies ubiques pour se forger son petit labyrinthe, le film est à revoir toutes affaires cessantes.

La Guerre est finie
6.6

La Guerre est finie (1966)

2 h 01 min. Sortie : 11 mai 1966. Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Une fois de plus, l’auteur puise dans les tourments de l’histoire la plus contemporaine (ici, le conflit espagnol) la source de sa réflexion – il est question de conscience, d’engagement, des doutes qu’il implique. Tourné deux ans avant mai 68, il rend compte de la crise que traverse un mouvement communiste tiraillé entre l’orthodoxie des cadres permanents et l’impatience exaltée des jeunes dissidents. S’il semble rompre de manière assez nette avec les percées avant-gardistes des films précédents, Resnais ne développe pas moins une forme particulièrement travaillée, jouant des ruptures, des décors, des éclairages insolites pour mieux explorer la crise idéologique à la veille de la révolution étudiante. Sobre et subtil, Yves Montand apporte à l’œuvre un supplément d’âme.

Je t'aime, je t'aime
7.1

Je t'aime, je t'aime (1968)

1 h 34 min. Sortie : 24 avril 1968. Drame, Science-fiction

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

"Eternal Sunshine of the spotless Mind" avec 35 ans d’avance, et à la sauce Resnais. Autant dire un fascinant labyrinthe de souvenirs déformés et de méandres psychologiques qui met en conflit le présent et le passé, la conscience et l’inconscience, et qui s’élabore en une perception déréglée du temps, un puzzle à la douleur sourde, tragique, à la poésie étrangement angoissante, poussant le montage (exceptionnel) et la construction à des sommets de virtuosité. Claude Rich y est formidable de sensibilité blessée et d’humour narquois en héros tourmenté, confronté à la logique de ses affects le long d’une ronde mémorielle aux explications lacunaires mais riche d’idées géniales (la souris perdue sur la plage du souvenir voisin, la lecture désopilante de la lettre oulipienne…). Un grand film injustement méconnu.
Top 10 Année 1968 :
http://lc.cx/2ir

Stavisky
6

Stavisky (1974)

2 h. Sortie : 15 mai 1974. Biopic, Policier, Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Surprise : Alain Resnais s’octroie les services d’une grande vedette commerciale de l’époque pour dresser le portrait d’un escroc joueur et séducteur dans la France des années 30, mi-Fantômas mi-Arsène Lupin, à l’origine d’un des plus énormes scandales de la IIIème République. Il analyse ce qui nous guette et ce qu’on nous montre, les révolutions qu’on nous cache le plus longtemps possible, et dénonce un spectacle donné en tout que tel (les golfs, les palaces, les bijoux…), abandonné aux charmes discrets du rétro, pour faire éclater une vérité politique toujours déterminante : la manipulation de l’opinion. La chronique est ironique, vive, drôle quoique subtilement mélancolique, d’une grande tenue plastique, la créativité proverbiale de l’auteur s’habillant d’une apparente désinvolture qui ajoute au plaisir.

Providence
7.2

Providence (1977)

1 h 50 min. Sortie : 9 février 1977 (France). Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 10/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Mystères et développements de la rumination littéraire, bilan d’une existence où personnages réels et doubles imaginaires s’invitent à la fête, labyrinthe d’une construction-gigogne se faisant et se défaisant sous nos yeux. La beauté subtilement onirique des décors, l’inquiétude funèbre qui exsude de chaque plan, l’humour absurde et la malice caractéristiques de son auteur, l’extrême raffinement d’une forme à la fois abstraite et charnelle, le dialogue entre les différents champs de réalité, le décalage fantasmatique, instable, mouvant, de situations qui renseignent sur les pensées, les souvenirs, les angoisses, l’intériorité d’un homme, et qui renvoient aux mécanismes de la création mentale… Tout cela se met au service d’une profonde réflexion sur le trompe-l’œil, la confusion des sentiments, la maladie, la mort. Resnais au sommet de son art.
Top 10 Année 1977 :
http://lc.cx/AUt

Mon oncle d'Amérique
7.2

Mon oncle d'Amérique (1980)

2 h 05 min. Sortie : 21 mai 1980. Comédie dramatique, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

Jamais en panne d’imagination, porté par une incroyable capacité à se lancer de nouveaux défis, le réalisateur adopte cette fois un regard rigoureusement scientifique et investit l’étude anthropologique et comportementale du professeur Laborit pour en formaliser le cheminement avec les moyens du cinéma. Le résultat est éblouissant de virtuosité, d’humour et d’intelligence, un jubilatoire jeu de démonstration entre intime et empirisme, individualité et civilisation, qui interroge profondément ce qui nous habite, fouille les racines de nos rêves, nous apprend les chemins de la liberté et appelle à la lucidité. Relevant d’une forme d’écriture automatique faite de plaisir et d’imprévu, les dispositifs de narration relient la neuropsychiatrie à la socioculture, l’inconscient au collectif, avec une inspiration constamment renouvelée.
Top 10 Année 1980 :
http://lc.cx/Uyg

La Vie est un roman
5.9

La Vie est un roman (1983)

1 h 55 min. Sortie : 20 avril 1983. Comédie dramatique

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Dans un château fait de bric et de broc, Resnais entremêle les époques, ramifie trois récits qu’il fait se répondre en un patchwork pour le moins déroutant. Au lendemain de la guerre, un comte excentrique propose à ses hôtes un conditionnement complet qui doit les mener à un bonheur virginal. De nos jours, une poignée d’instituteurs soixante-huitards tient un séminaire sur l’éducation de l’imaginaire. Hors du temps se déroule un conte de fées surréaliste, avec dragon vert, princesse et preux chevalier. Et cette spéculation sur l’échec des utopies, pleine d’humour, de pirouettes et de chansons, de faire le constat de notre impuissance à aimer, à connaître le bonheur, à bâtir un monde de justice. L’œuvre, audacieuse mais fragile, doit beaucoup au charme et à la fantaisie de tous ses comédiens.

L'Amour à mort
6.5

L'Amour à mort (1984)

1 h 32 min. Sortie : 5 septembre 1984. Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

"Simon, ne sois pas mort !" hurle Élisabeth, désemparée, au début du film. "Nous ressusciterons..." affirme son amie Judith à la fin. À sa façon, Resnais s’inscrit dans l’héritage romantique de l’amour absolu, prisé par les surréalistes, au travers d’une méditation intense, frémissante, dépouillée, où dialoguent la foi de ceux qui croient et le désarroi de ceux qui veulent savoir. Comme les pulsations d’un au-delà onirique, des images sombres et floconneuses scandent le parcours spirituel d’un couple lié par-delà la frontière du vivant : l’homme attiré par la mort après l’avoir entraperçue, la femme n’aspirant qu’à le rejoindre, portée par un espoir irraisonné. Rien de morbide, de funèbre n’émane pourtant de ce poème spectral, peut-être l’un des films les plus intimes et émouvants de son auteur. Magnifique interprétation.
Top 10 Année 1984 :
http://lc.cx/UVv

Mélo
6.7

Mélo (1986)

1 h 50 min. Sortie : 3 septembre 1986 (France). Drame, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

La route suivie par Resnais semble dès lors s’aventurer sur l’éventuelle réconciliation du cinéma et de la théâtralité. La somptueuse orchestration assume les artifices de la représentation mais il faut sans doute franchir une certaine résistance pour apprécier pleinement ce développement tragique à la prose travaillée, et s’approprier les émotions de personnages qui semblent sortis de quelque dimension éloignée. Jouant à nouveau avec les notions du libre arbitre, du hasard, du destin, le cinéaste filme un couple au bord de l’enfer dans une société en train de s’enliser. Entre duels à fleurets mouchetés et sentiments irréversibles, il fait fructifier la douleur intime du précédent film sur un registre plus distancié : son mélo étonne par la beauté de ses intuitions formelles, mais il touche moins.

I Want to Go Home
5.4

I Want to Go Home (1989)

1 h 45 min. Sortie : 27 septembre 1989 (France). Comédie

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 6/10.

Annotation :

Pas difficile de percevoir ce qui a pu séduire le réalisateur dans ce projet : le dessin et la BD, la structure éclatée avec des personnages qui se cherchent jusqu’à la réunion finale, l’intrusion de l’imaginaire dans la réalité… En racontant les retrouvailles conflictuelles d’un auteur de comics américain et de sa fille à Paris, le film orchestre le choc des cultures, la danse de l’incommunicabilité, la valse des rendez-vous manqués, mais sur un tempo de vaudeville anachronique. Chassés-croisés, quiproquos, élans brisés contre les barrières du langage se culbutent jusqu’au bal costumé donné dans une grande demeure campagnarde, au cours duquel les masques tombent : un genre de Feydeau à Marienbad. Original, risqué donc estimable, l’exercice est aussi un peu contraint, faussement désinvolte et lourdement agité.

Smoking
7

Smoking (1993)

2 h 20 min. Sortie : 15 décembre 1993 (France). Comédie dramatique

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Deux acteurs, deux films, neuf personnages, des dizaines de possibilités. Si Resnais joue avec les conventions théâtrales du projet, il propose à nouveau, en arpenteur de l’imaginaire, une expérience cinématographique unique en son genre. Multipliant les combinaisons structurelles, il invente un réseau de variations autour d’une infinité de potentiels narratifs, une sorte de fiction à géométrie variable à mi-chemin entre Pirandello et la comédie de boulevard. Pathétiques et jubilatoires, ludiques et aléatoires, ces destinées paradoxales ponctuées par les caprices du hasard, le passage du temps et les occasions manquées agissent comme des opus incertum, où les contingences de la réalité débouchent sur d’intimes vérités. Déterminisme ou libre arbitre, humour ou tragédie, pur instinct de jeu et vertige métaphysique. Je jubile.
Top 10 Année 1993 :
http://lc.cx/UPf

No Smoking
7.1

No Smoking (1993)

4 h 58 min. Sortie : 15 décembre 1993 (France). Comédie dramatique

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 9/10.

Annotation :

Voir ci-dessus.

On connaît la chanson
6.8

On connaît la chanson (1997)

2 h. Sortie : 12 novembre 1997. Comédie musicale, Drame, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

Les préoccupations socio-psychologisantes de Bacri et Jaoui rencontrent les velléités expérimentales jamais taries du cinéaste. Divertissement au sens le plus pascalien du terme, cette ronde chorale de personnages minés par la dépression fait apparaître de véritables angoisses, des vraies névroses, un taboulé de comportements régis par la culpabilité, le remords ou l’hypocondrie, mais le ton est constamment à la fantaisie et à l’humour, qui lui confèrent une chaleur réconfortante. S’y déploie une belle densité humaine, tandis que Resnais fait chanter la mélodie de la vie en mariant avec le même brio divertissement et profondeur, innovation et spectacle populaire, légèreté et gravité, réel et factice, à la poursuite de ces méduses qui charrient tout le fretin des émotions, des pulsions et des phobies.
Top 10 Année 1997 :
http://lc.cx/UPQ

Pas sur la bouche
6.1

Pas sur la bouche (2003)

1 h 55 min. Sortie : 3 décembre 2003 (France). Comédie, Comédie musicale, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 5/10.

Annotation :

Ce film m'apparaît moins convaincant, sans doute en partie parce que l’argument (une opérette des années 20 à peine transfigurée) me parle peu. Habité par la libre pensée artistique, le spectacle kitsch, dont la frivolité ne dissimule pas tout à fait les troubles politiques et sociaux de l’époque, multiplie allègrement désirs de flirts, fringales d’étreintes, pulsions insatisfaites, en les baignant dans les artifices du jeu, avec ses règles et ses codes surannés. Resnais me semble davantage dans l’exercice de style, et quand bien même son exécution demeure brillante, boostée par un sens du rythme infaillible, bardée de fulgurances (tout le travail sur le décor et ses effets de miroir) et de saillies drolatiques ou morbides (genre Darry Cowl en tata concierge, faut oser), je reste un peu sur ma faim.

Cœurs
6.1

Cœurs (2006)

2 h 05 min. Sortie : 22 novembre 2006 (France). Drame

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 9/10 et a écrit une critique.

Annotation :

On retrouve le ton dépressif d’"On Connaît la Chanson", ses personnages perclus de vague à l’âme et de bleus au cœur, mais cette fois le climat est franchement hivernal, glaciaire, veiné de lassitude hébétée. Rarement Resnais aura été aussi mélancolique, et approché d’aussi près la vérité intime de ses personnages. Le surréalisme s’invite au sein du cadre et des rapports, fait d’une étrangeté sourde, à la lisière du fantastique : comme toujours, les bizarreries contribuent à manifester ce que l’ordinaire a d’extraordinaire, et témoignent de l’inventivité hardie d’un cinéaste qui privilégie la déréalisation au naturalisme et stylise pour mieux accéder à la vérité. Avec ses travellings majestueux, ses signes déroutants, ses lumières saturées, cette superbe ronde des sentiments blessés impose autant de raffinement qu’elle délivre d’émotion.
Top 10 Année 2006 :
http://lc.cx/UPh

Les Herbes folles
5.8

Les Herbes folles (2009)

1 h 44 min. Sortie : 4 novembre 2009 (France). Comédie dramatique, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 8/10.

Annotation :

À bien des égards Resnais s’inscrit ici dans le sillage de "Cœurs" mais il en décline l’inspiration chagrinée sur un mode extrêmement azimuté, fou – d’une folie qui confine à la névrose inquiétante. Dussollier y est un formidable électron libre, menaçant le récit de sa constante imprévisibilité, lui dictant sa forme déréglée, morcelée, faite d’accélérations brutales, de cuts impulsifs, d’enchaînements brutaux (ne pas se méprendre cependant : l’ombre de la mort se profile derrière le sourire, qui cache une forme secrète d’angoisse). Fantaisie de jeunesse sur les surprises de l’inconscient jaillissant sans prévenir et bouleversant notre quotidien, le film vire par instants à l’expérience sous cloche, à la petite chimie de laborantin, mais il s’exprime ici une telle liberté que cette impression s’efface devant l’étonnement.

Vous n'avez encore rien vu
6

Vous n'avez encore rien vu (2012)

1 h 55 min. Sortie : 26 septembre 2012. Comédie dramatique

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

Resnais en est arrivé à un stade de souveraineté et de malice mêlées qui voit chaque nouvelle livraison s’imposer à la fois comme une récapitulation et un pied-de-nez. Une fois de plus, les jeux de l’esprit qu’il propose recèlent leur part de raideur conceptuelle. Et à nouveau, il dépasse les intentions du dispositif, s’impose en enchanteur d’une fascinante ronde de spectres et d’agencements, de voix et de visages. La luxuriance des ajustements et des combinaisons, la fluidité musicale des transitions apportent vie et chair à l’écran. Théâtre, passion, mort, destin sont autant de motifs que le chevauchement des espaces temporels révèlent dans les modulations infinies de l’interprétation – cette caisse de résonance dont les acteurs sont les artistes, et auxquels le film rend un vibrant hommage.

Aimer, boire et chanter
5.5

Aimer, boire et chanter (2014)

1 h 48 min. Sortie : 26 mars 2014. Comédie, Drame, Romance

Film de Alain Resnais

Thaddeus a mis 7/10.

Annotation :

On s’en doutait mais ce ne sera toujours pas avec sa dernière livraison que Resnais se prendra soudain au sérieux. Pendant guilleret du film précédent, qu’il relit sur un mode volontiers trivial, voire grivois, l’adieu du cinéaste fait turbiner son goût éprouvé des dispositions minuscules et des petites machineries facétieuses en feignant le boulevard de chez mamie Nova pour mieux faire briller ses trouvailles invisibles. Ce sera donc un ultime tour de rigolade, une triple comédie de remariage inventoriant en mode mineur sa brocanterie vivante et charmeuse, où l’artiste réussit le double tour de force d’amuser en dénudant tous ses artifices, et de se filmer dans la tombe avec la satisfaction sereine de celui qui a bien vécu (la dernière scène et l’image de clôture laissant aussi étonné que ravi).

Thaddeus

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