Thomas Zlowodzki : "Après l’échec de Reconquête !, l’union des droites n’est pas pour demain"<!-- --> | Atlantico.fr
Atlantico, c'est qui, c'est quoi ?
Newsletter
Décryptages
Pépites
Dossiers
Rendez-vous
Atlantico-Light
Vidéos
Podcasts
Politique
Quel avenir pour l'union des droites à l'issue du premier tour de l'élection présidentielle d'avril 2022 ? Le collectif Droite pour la France a publié un communiqué.
Quel avenir pour l'union des droites à l'issue du premier tour de l'élection présidentielle d'avril 2022 ? Le collectif Droite pour la France a publié un communiqué.
©AFP

Avenir de la droite

Entretien avec Thomas Zlowodzki, porte-parole du collectif Droite pour la France et conseiller municipal et communautaire à Sainte-Geneviève-des-Bois.

Thomas Zlowodzki

Thomas Zlowodzki

Thomas Zlowodzki est porte-parole du collectif Droite pour la France, conseiller municipal et communautaire à Sainte-Geneviève-des-Bois et ancien conseiller national LR.

Voir la bio »

Atlantico : Vous annoncez dans un communiqué prendre vos distances avec le parti d’Éric Zemmour. Quelles sont les raisons qui vous avaient amené à rallier Reconquête ! alors que vous étiez proches des Républicains en janvier dernier ? 

Thomas Zlowodzki : Il y a plusieurs choses. D’abord, il s’agit d’une divergence de fond avec la direction actuelle des Républicains, qui accepte de faire alliance au niveau local ou national avec Emmanuel Macron. Eric Zemmour n’appellerait pas à voter pour Emmanuel Macron comme Pécresse l’a fait. Pour nous, Emmanuel Macron a gouverné dans la continuité de François Hollande sur la plupart des sujets, donc on ne peut pas appeler à voter pour lui. Deuxièmement, nous avons rejoint Eric Zemmour avec  l’ambition de construire une maison commune de la droite. Cette maison commune devait accepter une plurabilité de sensibilités, et en particulier certains incontournables, comme la confiance dans l’économie de marché, l’urgence de réformer un État sur-administré et de diminuer des dépenses publiques excessives, des valeurs comme la famille, la méritocratie… L’idée était donc de refonder une « Droite plurielle ».

Qu’est-ce qui vous faisait dire qu’à l’époque, Éric Zemmour et Reconquête ! était le bon mouvement pour procéder à cette union des droites ou la construction de cette union commune ? 

Un certain nombre de choses allaient en ce sens, comme ses discours à Lille en septembre et en février. De plus, les thématiques de campagne évoquées nous semblaient plus variées que celles qui ont émergé dans d’autres partis. Les Républicains ont également tronqué leur pré-campagne en refusant une primaire ouverte, qui aurait pu inclure Éric Zemmour ou d’autres candidats. On pensait aussi qu’Eric Zemmour avait l’avantage d’apporter une crédibilité sur les sujets migratoires, de souveraineté … Nous pensions donc pouvoir construire avec Éric Zemmour d’autres aspects de la droite et qu’il serait possible de repousser de façon saine les performances du Rassemblement National. De plus, Éric Zemmour annonçait qu’il ferait appel à des membres des Républicains, du Rassemblement National et de la société civile. On peut aussi noter chez Les Républicains une sorte de fermeture au niveau du choix du candidat, ce qui n’allait pas forcément dans la direction des attentes des adhérents. 

À Lire Aussi

L’effet Ukraine : l’union des droites n’aura pas lieu (enfin pas tout de suite en tous cas…)

Considérez-vous que Reconquête! ne peut plus avoir ces ambitions d’union des droites ou s’agit-il plutôt d’un désaveux temporaire ?

Selon moi, il y a une forme de paradoxe, mais dont il faut tenir compte. Alors que son programme comporte des aspects intéressants, l’image de Reconquête ! sera durablement marquée par la focalisation sur la question de l’identité qui a été celui de son candidat pendant cette campagne. Cette image sera difficile à changer car il s’agisait de la campagne de fondation du parti. L’image de Reconquête ! et d’Éric Zemmour sont intimement liées et il faudra un certain temps avant de pouvoir imaginer un repositionnement d’image. Les Français perçoivent Reconquête ! comme étant à droite de Marine Le Pen. Sur certains aspects, ce ne serait pas gênant, comme sur l’économie par exemple. Pourtant, la question d’identité, qui nous paraît très importante, peut être dommageable quand elle est évoquée trop souvent. Nous pensons par exemple qu’il ne faut pas lier la question migratoire à tous les sujets. Par exemple, nous sommes favorables à à la suppression de la loi SRU (Solidarité et Renouvellement Urbain) qui oblige les communes à constuire au moins 25% de logements sociaux. Cette loi SRU entraine des problèmes d’urbanisme, de clientélisme local, de mobilité des personnes face au marché du travail. Notre ambition à droite est de bâtir une société où les citoyens soient libres et indépendants, sans dépendre de la puissance publique pour les questions de logement, par exemple. Mais Éric Zemmour a abordé cette question du logement social en évoquant l’islamisme… Les Français ont donc perçu chez lui une obsession identitaire alors que ce sujet du logement social est un enjeu politique majeur en soi pour notre pays. Dès lors, comment expliquer ce score si faible ? Les causes sont de diverses natures, mais ce qui est certain c’est que la part excessive accordée aux sujets migratoires et identitaires a conduit une grande partie des Français à ne pas véritablement écouter Éric Zemmour sur ses autres thématiques.

À Lire Aussi

2022, l’échec des droites. Mais à qui la plus grande faute ?

Cette union des droites doit donc s’exprimer contre Emmanuel Macron, qui est pour nous un homme de gauche. Prenons l’exemple du débat sur les retraites qui anime ce début de campagne d’entre deux tours. Aucun des deux candidats n’évoque l’introduction d’une part de capitalisation. C’est pourtant la seule solution pour maintenir le montant des pensions sans repousser excessivement l’age de départ ou augmenter encore les cotisations des actifs. Je regrette qu’Eric Zemmour n’ait pas retenu notre proposition de l’inclure dans son programme, ce qui aurait participé à rendre celui-ci plus équilibré et plus « de droite ».

Plus que l’échec électoral de Reconquête !, c’est son positionnement trop centré sur l’Islam et l’identité qui nous conduit à penser que ce mouvement ne peut plus être la clé de voute de l’union des droites, même si il pourra en être une des composantes.

Votre communiqué indique que vous invitez vos adhérents à voter selon leurs convictions. Dès lors, quel avenir imaginez-vous pour les législatives ? Un rapprochement avec LR est-il sur la table ? 

Malheureusement, nous allons très certainement rester en retrait de cette campagne, qui a d’ailleurs déjà commencé sur le terrain. L’avenir pour la droite est assez incertain. Quelle sera la dynamique du Rassemblement National ? Difficile de le dire tant que le second tour n’a pas eu lieu. Au-delà du score de Valérie Pécresse, Les Républicains sont au plus mal, puisqu’une partie des membres vont négocier des investitures avec Emmanuel Macron tandis que d’autres vont vouloir convaincre les électeurs de voter LR aux legislatives pour s’opposer à ce dernier.

À Lire Aussi

La droite face au dilemme du parti (fréquentable) unique

Comme une majorité des cadres Les Républicains appellent à voter pour Emmanuel Macron, le parti LR reste dans le piège initié par Mitterrand dans lequel Jacques Chirac nous a installé. Celui-ci consiste à dénoncer le Rassemblement National, ou toute force qui refuse l’immigration de masse dans notre pays, en affirmant qu’il est non-républicain et qu’il faut donc s’unir contre lui.

Tant que LR ne changera pas de présidence, il est difficile d’envisager quoi que ce soit avec eux. Est-ce que David Lisnard ou Laurent Wauquiez  vont essayer d’œuvrer pour faire évoluer les choses ? au sein de LR ou en dehors ? Nous réfléchirons à nos liens avec les Républicains ou à certains de leurs leaders une fois qu’il auront tranché cette question. Ce n’est malheureusement pas pour tout de suite.

Nous observerons aussi comment Reconquête ! évolue, nous ne fermons aucune porte, mais il paraît difficile qu’il change d’image, de stratégie et de cadres. La seule hypothèse possible serait que demain, après les législatives, les députés élus (s’il y en a, ce qui est loin d’être certain) de Reconquête ! animent le mouvement et complètent son incarnation, aujourd’hui centrée autour d’Éric Zemmour. Cette hypothèse nous paraît très incertaine, c’est pourquoi nous préférons reprendre notre autonomie.

Ainsi, si Les Républicains ne se reprennent pas et si Reconquête ! persiste dans sa stratégie, il y aura demain un espace pour un parti de droite complet et équilibré tout en étant crédible sur les sujets migratoires et identitaires délaissés par l’UMP et les LR depuis trop longtemps.

Propos recueillis par Guilhem Dedoyard

Pour retrouver le communiqué du collectif Droite pour la France : cliquez ICI

En raison de débordements, nous avons fait le choix de suspendre les commentaires des articles d'Atlantico.fr.

Mais n'hésitez pas à partager cet article avec vos proches par mail, messagerie, SMS ou sur les réseaux sociaux afin de continuer le débat !