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« Le Grand Paris des écrivains », de Stefan Cornic, sur le site du Pavillon de l’Arsenal : un subtil portrait de la capitale et ses environs en trente courts-métrages

Stefan Cornic, historien de l’art de formation, a réalisé une série documentaire sur la capitale, par le biais de textes inédits d’écrivains.

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Publié le 22 décembre 2022 à 18h30, modifié le 25 décembre 2022 à 08h37

Temps de Lecture 3 min.

« Le Grand Paris des écrivains » de Stefan Cornic, sur le site du Pavillon de l’Arsenal.

SITE DU PAVILLON DE L’ARSENAL - À LA DEMANDE - SÉRIE DE COURTS-MÉTRAGES

« Un écrivain contemporain choisit un quartier, une zone, un lieu du Grand Paris. L’écrivain écrit alors un texte du genre littéraire de son choix, en lien avec l’espace. La caméra, elle, capte l’esprit des lieux. Par moments, des correspondances se tissent entre le texte lu par l’écrivain en voix off et les images. A d’autres, des écarts développent une nouvelle narration qui libère l’imagination et les interprétations. Entre vision documentaire et fiction littéraire, les films offriront des instantanés du Grand Paris d’aujourd’hui pour dessiner le portrait d’une ville en mutation. »

C’est ainsi qu’est présentée, sur le site Internet du Pavillon de l’Arsenal – Centre d’information, de documentation et d’exposition d’urbanisme et d’architecture de Paris et de la métropole parisienne –, la série imaginée et tournée par Stefan Cornic. Cet historien de l’art de formation, passionné par les rapports entre art, architecture et cinéma, est l’auteur de nombreux documentaires télévisés ou institutionnels.

On avait été particulièrement frappé par L’Œil, le pinceau et le cinématographe (2021), sur Arte, dans lequel il prenait pour postulat, subtilement défendu, que l’œil cinématographique précédait l’invention du cinématographe, en s’attachant particulièrement au cadre de la ville-spectacle qu’est le Paris haussmannien.

« Un immense trapèze vide »

Pour Le Grand Paris des écrivains, constitué de trois saisons de dix épisodes chacune, Stefan Cornic juxtapose des plans, souvent fixes et brefs, trace des axes, des lignes de fuite que certains textes, comme celui d’Aurélien Bellanger, évoquent aussi : « Quand on est dos à l’Opéra, c’est la portion d’espace qui s’ouvre en haut de la rue La Fayette, l’autre axe de Paris, après la voie royale – mais sans Arc de triomphe, sans Défense, sans rien à l’horizon. » L’écriture porte un regard cinématographique vers « un immense trapèze vide : le pays de France, l’un des plus beaux et des plus méconnus des paysages modernes ».

Pierre Assouline, La Défense, 2020.

Ce sont parfois des anecdotes ou des souvenirs de jeunesse – ceux d’Alice Zeniter à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine) et ses deux rues en coude reliées par un petit escalier, ou de Pierre Assouline, qui voyait, tout en pratiquant l’aviron entre Puteaux et Courbevoie (Hauts-de-Seine), le quartier de la Défense naître tour après tour.

Les poètes sont de la partie : Jean-Charles Massera (On ne pouvait pas [sa]voir), Simon Johannin (Cité Gagarine) et Jacques Jouet (La Montagne P) s’expriment en vers ; dans Melun 2000, le romancier, poète et performeur Marin Fouqué rappe un poème en prose épicé qui roule et tangue sous la langue et dans l’oreille, avec parfois des sons musicaux : « MMMMMMMMMMMMMMMMMM Melun/Moula/Mollard/Mélasse/Malaxe/Molosse Malice-cieux Mot lar-vé/Et les cieux… »

Pépites

On est touché par la jolie évocation du Père-Lachaise – à la manière de Colette, à sa fenêtre du Palais-Royal – par Camille Laurens : « L’hiver, les branches nues laissent voir la multitude des tombes grises ou parfois couvertes de neige, c’est très beau, même si on pense alors, fugitivement, au froid qui prend les corps. Dès que le printemps arrive, les feuilles cachent entièrement le cimetière et soudain, changement de décor, je donne sur une forêt. »

Il y a aussi, parmi les pépites de cette collection, le dernier trajet parisien du piéton qu’était Roland Barthes qu’imagine, sur un ton dépassionné, Laurent Binet, depuis la rue des Blancs-Manteaux jusqu’au Collège de France où il se rendait, juste avant l’accident où l’essayiste et sémiologue s’est fait faucher par une camionnette de blanchisserie, le 25 février 1980, avant de mourir, hospitalisé, un mois plus tard.

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Si elle pose son regard le plus souvent sur les éléments urbains et périurbains évoqués par les textes au cours de ces trois saisons disponibles, la caméra de Stefan Cornic n’est pas strictement illustrative. Elle n’en prend pas non plus le contre-pied, ce qui serait artificieux, mais tisse une manière de contrepoint.

Il n’y a pas de volonté esthétisante, et l’on voit Paris comme on le connaît depuis notamment la période du Covid-19 et du confinement : pas toujours propre, souvent embouteillé et orné de ces terrasses qui ont pullulé et perdurent. Mais cette lettre d’amour polyphonique à Paris intra et extra-muros n’en demeure pas moins une touchante mosaïque de fragments de discours urbain.

Le Grand Paris des écrivains, série documentaire de Stefan Cornic avec les contributions de Pierre Assouline, Aurélien Bellanger, Laurent Binet, Patrice Blouin, Olivier Cadiot, Thomas Clerc, Laurence Cossé, Marie Darrieussecq, Julia Deck, Marin Fouqué, Faïza Guène, Célia Houdart, Maylis de Kerangal, Philippe Jaenada, Simon Johannin, Jacques Jouet, Camille Laurens, Nina Leger, Jean-Charles Massera, Valérie Mréjen, Emmanuelle Pireyre, Eric Reinhardt, Marie Richeux, Régine Robin, Ryoko Sekiguchi, Leïla Slimani, Joy Sorman, Fanny Taillandier, Delphine de Vigan, Alice Zeniter (Fr., 2019-2022, 4 min-6 min). Sur le site du Pavillon de l’Arsenal.

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