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Décryptage

Avoir un job avec du sens et un bon salaire, c'est possible !

La moitié des étudiants et alumni des grandes écoles envisagent d'accepter une baisse de leur rémunération de 5 % à 20 % pour aligner leur travail avec leurs valeurs, souligne le baromètre d'Ipsos, du BCG et de la Conférence des grandes écoles. Mais avoir un job à impact implique-t-il toujours d'être moins bien payé ? Pas forcément, surtout si vous êtes bien formés.

« Il n'y a pas forcément de décote de salaire lorsque l'on cherche un job à impact dans le secteur marchand, dans les grandes entreprises ou ETI », souligne Frédéric Benay, managing director au sein du cabinet de recrutement Michael Page.
« Il n'y a pas forcément de décote de salaire lorsque l'on cherche un job à impact dans le secteur marchand, dans les grandes entreprises ou ETI », souligne Frédéric Benay, managing director au sein du cabinet de recrutement Michael Page. (Getty Images/Pict Rider)

Par Fleur Bouron

Publié le 31 mai 2023 à 17:24Mis à jour le 1 juin 2023 à 09:39

Entre 40 et 60.000 euros brut par an pour un chef de projet dans les énergies renouvelables en début de carrière, 45 à 60.000 euros pour un analyste extra-financier, 70 à 90.000 euros pour un directeur diversité et inclusion : ces trois métiers qui ont la côte dans l'impact (soit le secteur des métiers qui ont un impact positif sur la société) sont la preuve que l'on peut travailler, trouver du sens, et vivre (très) correctement.

Secteur de l'économie sociale et solidaire (ESS) mis à part (on y reviendra), « il n'y a pas forcément de décote de salaire lorsque l'on cherche un job à impact dans le secteur marchand, dans les grandes entreprises ou ETI », souligne Frédéric Benay, managing director au sein du cabinet de recrutement Michael Page qui a supervisé une étude de rémunération sur les métiers de la RSE.

Et pour cause, les besoins en main d'oeuvre sont immenses. Le plan de transformation de l'économie française du Shift Project, un think tank dédié à la décarbonation de l'économie fondé par Jean-Marc Jancovici, prévoit la création de 1,1 million d'emplois verts d'ici 2050. Pour l'heure, encore trop peu de personnes sont formées et expérimentées dans le secteur de la RSE et du développement durable. « Cela pousse les salaires à la hausse, c'est le jeu de l'offre et de la demande », explique Frédéric Benay.

Chief value officer, le directeur financier de demain

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Pour Fabien Secherre, porte-parole de Makesense, une association qui permet à des entrepreneurs, intrapreneurs et citoyens d'agir pour une société inclusive et durable, le rattrapage des salaires est déjà là. Surtout que les métiers verts ne sont pas forcément des créations de postes. « Un responsable d'achat, s'il se forme pour acheter durable, va gagner le même salaire qu'auparavant », souligne ce dernier.

« Il y aura beaucoup d'‘upskilling' (formation) ou de ‘re-skilling' (requalification) », détaille Frédéric Benay. Ainsi, un data scientist, très prisé sur le marché, le sera encore plus lorsque les entreprises seront bientôt obligées de produire un rapport extra-financier sur leur impact sociétal et environnemental. Ils seront les seuls capables de traiter autant de données, et leur spécialisation « verte » sera un atout majeur.

Dans tous les secteurs marchands, il est donc possible de trouver chaussure à son pied parmi les jobs de la RSE, verts, verdissants, ou encore « classiques » dans un secteur à impact. Mais parmi eux, quels métiers qui ont le plus la côte et/ou rémunèrent le plus ? « Ceux qui touchent à la décarbonation, aux énergies renouvelables, à la biodiversité, dans la finance à impact, et le conseil », liste Frédéric Benay.

Et d'ajouter : « Mais le nouveau métier auquel je crois beaucoup, qui sera le futur directeur financier de demain, c'est le chief value officer ». Ce dernier s'assurera que l'entreprise crée, en plus de la valeur financière, de l'impact sociétal et environnemental .

Made with Flourish
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Décrochage dans l'ESS

Il ne faut pas compter sur la recherche de sens pour faire pression à la baisse sur les salaires, prévient Frédéric Benay. « Ça serait une erreur de penser que parce qu'un métier a du sens, l'entreprise n'est pas obligée de faire un effort d'un point de vue financier. Personne ne veut faire de cadeau à son entreprise », souligne le directeur.

Seul le secteur de l'ESS tient une place à part dans le milieu de l'impact. C'est dans ce secteur - où les activités et le fonctionnement des entreprises (coopératives, associations, fondations, mutuelles, etc) sont fondées sur un principe de solidarité et d'utilité sociale - que l'on observe un décrochage des salaires. « Selon l'Apec (Association pour l'emploi des cadres, NDLR), les salaires de cadres dans l'ESS sont environ 10 % inférieur au reste de l'économie. Cet écart est de 7 à 8 % pour les juniors et il se creuse avec l'ancienneté, car les salaires de l'ESS sont plafonnés, dans un rapport d'un à sept », détaille Fabien Secherre. Autrement dit, les cinq mieux payés ne doivent pas toucher plus de sept fois le SMIC et le mieux payé ne peut pas le dépasser de dix fois.

Lui-même, après 17 ans dans le marketing, dont trois comme directeur marketing dans l'entreprise de chauffeur privé Marcel, a diminué son salaire de 10 % en travaillant chez Makesense. Il gagne aujourd'hui 70.000 euros brut par an, « un niveau de salaire qui reste très élevé par rapport à la moyenne des Français », s'empresse-t-il d'ajouter.

« Se tourner vers l'ESS, c'est presque un choix militant, lié à la raison d'être de l'organisme en question », précise Frédéric Benay. Sur la même longueur d'onde, Fabien Secherre conclut : « C'est incompatible de faire la course à la croissance de mon salaire tout en bossant pour diminuer l'impact des entreprises. »

Fleur Bouron

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