Les Palestiniens n’existent pas, c’est un ministre israélien qui le dit à Paris

Bezalel Smotrich, le ministre israélien des Finances, lundi 20 mars à Jérusalem. ©AFP - GIL COHEN-MAGEN / AFP
Bezalel Smotrich, le ministre israélien des Finances, lundi 20 mars à Jérusalem. ©AFP - GIL COHEN-MAGEN / AFP
Bezalel Smotrich, le ministre israélien des Finances, lundi 20 mars à Jérusalem. ©AFP - GIL COHEN-MAGEN / AFP
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Dans d’un discours à Paris, Bezalel Smotrich, le ministre israélien des Finances, a nié l’existence des Palestiniens, s’attirant des réactions de colère à Ramallah, Amman, et Bruxelles. L’extrême droite, dont il est l’un des chefs, ne craint pas de provoquer une crise violente avec les Palestiniens.

Bezalel Smotrich voudrait mettre le feu aux territoires palestiniens, il ne s’y prendrait pas autrement. Le ministre israélien des Finances n’en est pas à sa première déclaration incendiaire. Mais celle qu’il a prononcée dimanche soir à Paris provoque bien des réactions.

Ce dirigeant d’extrême droite, installé dans une colonie de Cisjordanie, devenu ministre dans la coalition de Benyamin Netanyahou, dit le fond de sa pensée : « Le peuple palestinien, a-t-il dit, est une invention de moins de cent ans. Est-ce qu’ils ont une histoire, une culture ? Non, ils n’en ont pas. Il n’y a pas de Palestiniens, il y a juste des Arabes. »

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Comme si les paroles ne suffisaient pas, le podium devant lequel s’exprimait le ministre était décoré d’une carte du « Grand Israël » incluant non seulement la Cisjordanie, mais aussi le Royaume de Jordanie, avec lequel Israël a pourtant un traité de paix.

Bezalel Smotrich est cohérent. Il pensait cela avant d’être au gouvernement, et il le répète une fois devenu ministre, même si sa parole n’a évidemment pas le même poids. Et il prononce ces paroles au cours d’un hommage parisien à Jacques Kupfer disparu en 2021 : Kupfer était un dirigeant de la droite dure, hier en France, puis en Israël, opposé aux accords avec les Palestiniens.

Nier l’existence d’un autre peuple devrait être un tabou infranchissable pour un dirigeant juif d’Israël. Or ce n’est pas une position nouvelle. Golda Meir, alors premier ministre, avait déclaré en 1969, deux ans après la guerre des six jours qui a donné à Israël le contrôle de l’ensemble des territoires palestiniens, que : « les Palestiniens n’ont jamais existé ». Elle ajoutait peu de temps après : « Comment pourrions-nous rendre les territoires occupés ? Il n’y a personne à qui les rendre ».

En 1993, Israël a finalement trouvé, en signant les Accords d’Oslo avec Yasser Arafat - on se souvient de la fameuse poignée de main entre le chef de l’OLP et le premier ministre israélien Yitzhak Rabin. Mais Rabin fut assassiné et, avec lui, l’espoir d’une paix avec deux États. L’extrême-droite religieuse en Israël porte une lourde responsabilité dans cette fin tragique.

Hier, aussi bien le premier ministre palestinien que le gouvernement jordanien ont réagi avec colère. L’ambassadeur d’Israël à Amman a même été convoqué. L’Union européenne, par la voix de son chef de la diplomatie, Josep Borrell, a appelé le gouvernement israélien à désavouer son ministre.

Le plus extravagant est qu’au moment où le ministre parlait à Paris, officiels israéliens et palestiniens étaient réunis à Amman avec des représentants de l’Égypte, de la Jordanie et des États-Unis, pour tenter de sauver les arrangements de sécurité qui sont menacés à l’approche du Ramadan. Depuis le début de l’année, plus d’une centaine de personnes, en grande majorité des Palestiniens, ont été tuées dans des affrontements ou des attentats.

Ce que montrent les déclarations de Bezalel Smotrich, c’est qu’une partie de la coalition israélienne ne craint pas la crise, voire la souhaite. Elle espère ainsi franchir une nouvelle étape dans la prise de contrôle rampante des territoires palestiniens.

En niant l’identité palestinienne, on déconnecte les habitants de leur terre : le rêve de cette aile extrémiste est de pouvoir les expulser un jour vers d’autres pays arabes puisque, selon elle, ils n’ont pas de pays à eux. C’est un jeu dangereux, y compris pour les Israéliens eux-mêmes.

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