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Julia, franco-israélienne, de retour en Isère pour fuir la guerre, témoigne

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Alors que la guerre entre le Hamas et Israël fait rage, des franco-israéliens choisissent de rentrer en France. C'est le cas de Julia qui vit à Tel Aviv depuis 10 ans. Avec son mari, elle est rentrée en Isère où vivent ses parents pour mettre à l'abri ses enfants de 3 ans et de 11 mois.

Julia a choisi de quitter Tel-Aviv et de rentrer en Isère pour protéger ses deux jeunes enfants Julia a choisi de quitter Tel-Aviv et de rentrer en Isère pour protéger ses deux jeunes enfants
Julia a choisi de quitter Tel-Aviv et de rentrer en Isère pour protéger ses deux jeunes enfants © Radio France - Véronique Pueyo

France Bleu Isère : Quand avez-vous fait votre Alya ?

Julia - Alors ça va faire dix ans que je vis en Israël. Je suis arrivée en Israël en juin 2014, donc j'avais déjà connu une guerre, celle de 2014. Là, on a senti que c'était différent. De par l'attaque terroriste en fait, qui a été tellement violente et surprenante. C'est plus ça que les bombardements auxquels finalement, malheureusement, on s'habitue. Ce qui est terrible c'est la sauvagerie des gens, le nombre de terroristes qui est rentré parce qu'on pensait que la frontière était imperméable et en fait non.

Pourquoi avoir fait le choix de rentrer en France ?

On est rentré en France parce qu'on a voulu mettre nos deux enfants à l'abri et parce que, pour la première fois, en près de dix ans en Israël, on a eu peur, avec mon mari. On a vraiment eu peur. En fait, on pensait qu'Israël était un pays fort,  que c'était le seul endroit au monde où vraiment les juifs pouvaient vivre en paix. Et ce matin du 7 octobre, toutes ces certitudes ont volé en éclats. On s'est dit : on met les enfants à l'abri et on voit ce qui se passe. On a beaucoup de chance parce qu'on avait la possibilité de le faire, du fait qu'on est aussi Français, du fait que mes parents sont toujours installés ici, donc on vit chez eux, dans la vallée du Grésivaudan. On voulait éviter aux enfants un traumatisme, car les bombardements, sur Tel-Aviv, c'est une à trois par jour. ET de cela, on en parle pas assez dans les médias.

Et quand vous êtes arrivée ici en France, quel accueil avez-vous reçu ?

Mon fils aîné, il parle l'hébreu aussi. Et tout d'un coup, je me suis rendue compte qu'il pouvait être victime, qu'il pouvait être une cible. Donc on s'est mis un petit peu à stresser. Et puis on a vu en fait qu'il n'y avait pas un soutien massif ici, en France, qu'il n'y avait pas ce qu'il y a eu pour le Bataclan. En Israël, on était solidaire de la France mais aujourd'hui, c'est toujours : oui, mais. Et effectivement, je me suis dit mince mais comment ils font les juifs de France? Ils doivent se sentir tellement seuls. Ici, il y a des gens qui taguent des choses affreuses qu'on n'aurait jamais imaginé revoir, qui veulent nous faire du mal, qui veulent nous détruire. Quel rapport entre un juif en France et Israël?

Avez-vous peur depuis que vous êtes rentrée en France ?

Je n'irai pas vendredi soir à la synagogue en ce moment. On fait attention. Je ne mettrai pas une étoile de David autour de mon cou. Par exemple, si je vais dans un restaurant ou dans un café, on parle beaucoup de ce qui se passe en Israël bien sûr et je me suis surprise à parler à voix basse et là, je me suis dit que cela n'allait pas !

Comment expliquez-vous cette montée de l'antisémitisme en France ?

Je pense qu'il y a un manque d'information, de l'ignorance. Je pensais aussi qu'il y aurait beaucoup plus de gens qui diraient qu'il faut virer le Hamas de Gaza, virer ces terroristes. Et il y a un énorme amalgame. En fait les gens qui disent : "Free Gaza" ne disent pas "Free Gaza from Hamas". Mais qu'est-ce que ça veut dire? Il n'y a plus d'Israéliens à Gaza depuis 2005. Le Hamas, c'est juste des gens qui ont pris le pouvoir par la haine, qui ont terrorisé d'abord les Palestiniens, d'abord les Gazaouis, leur propre population. Ils ont jeté des homosexuels par la fenêtre juste parce qu'ils sont homosexuels, ont forcé les femmes à mettre le voile et maintenant ils rentrent à l'intérieur de nos maisons en Israël pour faire un carnage, pour faire juste de la barbarie.

Qu'allez-vous faire ? Vous allez rester combien de temps ici? Parce que je suppose qu'il y a de la culpabilité aussi d'avoir laissé vos amis là-bas, votre vie ?

Tout est en stand-by, notre vie est en pause. On est là à contempler, impuissants. Et puis, il y a notre chagrin, notre deuil. Parce qu'enfin, on ne peut pas oublier comme ça en une seconde, ce qui s'est passé. Mais on tente quand même de se réjouir déjà d'être en bonne santé, de pouvoir voir nos enfants tous les matins, de pouvoir les serrer dans nos bras. C'est très important et c'est essentiel. On se ressource comme ça mais tant qu'il y aura des bombardements sur Tel-Aviv, ça nous semble impensable d'exposer nos enfants à une telle violence. On est toujours dans la sidération et on tente de se relever, d'avancer. Mais il faut qu'on soit indulgent envers nous-mêmes et qu'on prenne le temps. En tout cas, ce qui est sûr, c'est qu'on retournera en Israël, que notre place est là-bas.

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